Mer du Nord je t’aime moi non plus

Récit d’une traversée entre Nieuwpoort (Belgique) et Inverness (Ecosse)

Samedi après-midi de début d’été. Il fait chaud. Les voiliers sont sortis par centaines du plus grand port de plaisance belge. Ils barbotent devant l’estacade. Certains font des régates autour de trois bouées, ravis de jouer avec une brise thermique plus soutenue que prévu.

Papa Charlie file au nord-ouest, tourner autour de trois bouées ce n’est pas son truc. L’équipage savoure l’entrée en matière douce. Vers 18h on prend l’apéro. Bières sans alcool et chips. À 20h, on mange des pâtes bolognaise et puis on enchaîne avec les quarts. Stijn et Evarest assureront pendant quatre jours et quatre nuits les quarts de 20h-0h, 4h-8h et 12h-16h. Invité de dernière minute, Cédric, et moi-même on fera les autres quarts, dont le redouté minuit-quatre heures.

La nuit est courte si proche du solstice d’été. Papa Charlie croise des cargos du rail montant et descendant. Le vent tourne de nord-ouest à sud puis sud-est. Empannage direction Norwich. La vigilance est de mise entre bancs de sables, éoliennes puis plateformes pétrolières. Nous sommes à moins de 250km de la Belgique et le pétrole et gaz sont rois. On croisera des plateforme par centaines. Souvent sur notre route. Parfois les opérateurs nous interpellent à la VHF (radio) avec l’injonction de maintenir une distance de sécurité d’au moins 500 m.

Certaines plateformes ont un réseau gsm qui permettent l’envoi de quelques whatsapp et mise à jour de la météo. Cela sera utile pour comprendre notre déroute.

Le vent rentre progressivement de l’ouest pendant la journée du dimanche. La météo annonce 20 noeuds, rafales à 30 pendant 24 heures pour lundi.

La guerre et la déroute

Bien que prévenu, la météo me surprend. Pendant 24 heures le vent ne tombera pas en dessous de 26 noeuds. Souvent même établi à 28-29 noeuds. Quelques rafales au dessus de 30. Les conséquences sont énormes. Sous 2 ris et avec un génois bien roulé, Papa Charlie file à 8-9-10 noeuds. Des surfs à 12-14 et même 15 noeuds. Record battu.

Les vagues grossissent tout au long de la journée jusqu’à atteindre 5-6 m. On ferme le capot de descente pour éviter d’inonder l’intérieur du bateau. Déferlantes. Départ au lof. Le bateau tape. Mais le bateau est marin et nous ne casserons rien. Personne n’est malade même si on ne se nourrit que de biscuits, pommes et bananes.

Où est le problème me direz-vous ? Bah on file tout droit vers la Norvège. Papa Charlie n’arrive pas à remonter au vent. Au mieux on fait du 110 degrés au vent, cap au nord-est (50-60°) au lieu de faire du 320-330°. Pendant 12h on s’éloigne même de notre objectif à la pointe de Peterhead. Heureusement on a de l’eau à courir, pas de risque de se fracasser sur la côte.

Mes pensées sont noires. Ai-je mal évalué la météo ? Aurais-je pu plus nous décaler vers l’ouest à hauteur de Norwich. Et si on allait sur Stavanger en Norvège? Pas de problème pour l’équipage à bord? Mais pour les autres? Depuis Nieuwpoort on n’a pas croisé un seul voilier. On est vraiment des inconscients? Que fait-on là?

Le voilier a dérivé de plus de 100 MN (182 km) de sa route prévue.

Au près vers Fraserburgh

Après ce lundi noir, la météo s’améliore progressivement mardi. Le vent mollit et on commence à courber notre trajectoire vers l’Ouest. Papa Charlie est au près à vive allure. Cédric nous prépare à manger midi et soir. Pâtes viande légumes. Poulet semoule petit pois. Le moral remonte.

Et toujours des plateformes. Des grandes des petites. Le soir venu, l’horizon s’illumine de tous les côtés. Celles qu’on ne voyait pas de jour deviennent visibles. C’est un échec cuisant pour les britanniques. Tant de richesses pétrolières qui n’ont pas profité au pays. Les habitants du Royaume devrait avoir le niveau de vie de Norvège où des Pays-Bas, mais ils en sont tellement loin. Pourquoi?

Le vent mollit encore, tourne puis tombe mardi soir. On finit par 8h de moteur. Un bateau hydrographique nous interpelle à la VHF et nous demande de l’éviter de loin car il tire des câbles de mesure. L’opérateur a un fort accent de l’est. Russe?

Après une quatrième nuit en mer, on arrivera avec 20h de retard sur le planning espéré à Fraserburgh. Stijn me réveille alors qu’on n’est plus qu’à 2 MN du port. Ce port de pêche n’a pas de marina mais abrite une flotte de très grands bateaux de pêche. Le maître du port est trop content de nous accueillir. Papa Charlie s’amarre à un vieux bateau de pêche bleu clair. Cédric venu nous renforcer pour cette partie hardcore de la navigation file à la gare de bus, une importante réunion client l’attend en Belgique.

Le centre-ville de Fraserburgh est tout ce qu’il y a de plus déprimant. Bâtiments, gris moches et sales. Boutiques des années 80. Quelques kebabs. Béton et macadam partout. Voitures garées partout. Le ciel gris n’aide pas.

La vie au calme

Après avoir salué notre équipier, on revient sur le port pour un solide petit dej anglais au renommé « Fishermen’s mission », une coopérative qui nourrit les marins mais sert aussi de lieu de rencontre pour toute la ville. La salle qui compte une vingtaine de tables, n’a pas de fenêtres, ni d’aération. Une dizaine d’hommes boivent leur café. Les murs bougent sous l’effet de notre mal de terre.

L’estomac calé, on se promène sur les quais animés. Un bateau décharge sa pêche déjà emballée et congelée. De nombreux ateliers de réparation mécanique. Une rue de la peinture avec 3-4 bateaux en train de se refaire une beauté.

On continue vers une belle plage de sable fin. Une centaine d’enfants jouent. Tout me rappelle la mini-série adolescence (Netflix).

Cinquième nuit

Après quatre heures d’arrêt, Papa Charlie repart vers l’ouest pour 80 MN à travers le Moray Firth. Papa Charlie longe des vallées vertes au travers à 6 noeuds. On goûte l’Ecosse. On fait la course avec un voilier danois rencontré à Fraserburgh. Pendant que mes acolytes se reposent en prévision de la nuit, je commence le terrifiant livre « La Route » de Cormac McCarthy (Prix Pulitzer 2007).

Le vent tombe. Après quelques slaloms entre des bancs de sable , Papa Charlie s’amarre vers 3h du matin à la Inverness Marina. Shooté à l’adrénaline, je ne ressentais pas la fatigue. Une fois amarré cependant, je m’écroule pour 7h de sommeil.

Au réveil, après une rapide douche, nous franchissons les deux premières écluses du canal calédonien. Une autre aventure commence …

Quatre personnes posent sur un voilier de type Océanis 40 dans un port ensoleillé, entourées de bateaux à quai.
Départ de Nieuwpoort, grand soleil
Vue d'un voilier avec une voile en premier plan, naviguant près d'une plateforme pétrolière au large.
Plateforme pétrolière en Mer du Nord
Quatre hommes souriants sur un voilier, avec un océan calme en arrière-plan.
Un bâtiment avec une façade ornée de peinture colorée, des seaux de peinture éparpillés au sol, et un ciel nuageux en arrière-plan.
Atelier peinture à Fraserburgh
Trois hommes assis à une table dans un café, souriant et prenant un petit déjeuner, avec des assiettes de nourriture, des boissons et des condiments visibles.
Petit dej à Fraserburgh – Fishermen’s mission
Vue d'un voilier naviguant sur une mer calme, avec un ciel nuageux et une lumière douce au crépuscule.
Mer du Nord retrouve son calme
Un marin souriant sur un voilier amarré dans un port, entouré d'autres bateaux. En arrière-plan, des bâtiments blancs et un ciel nuageux.
Première écluse canal calédonien
[PRE-VENTE] Ma première transatlantique

[PRE-VENTE] Ma première transatlantique

Le prix initial était : €20,00.Le prix actuel est : €10,00.

Une transatlantique à 24 ans.
Deux mois en mer, un équipage haut en couleur.
Un récit drôle, humain et salé comme l’Atlantique.

La conversation que j’ai eue 1.000 fois dans ma vie:

Ami: Salut Miguel, tu sais quoi !!?? j’ai passé mon permis bateau !!
Moi: Ah oui, trop bien ça. Félicitations. Tu l’as passé où?
Ami: A l’école qui te donne un papier mais ne t’apprend pas à naviguer…
Moi: Ah ouiais, donc en fait tu as un papier mais tu ne sais pas naviguer. C’est ballot.
Ami: trop… en plus on a même appris les signaux sur l’Escaut.
Moi: C’est clair que cela ne sert à rien !

BREF. Après 40.000 MN de navigation en mer (oui ça fait 2 Vendée Globe bout à bout), je me décide ENFIN à partager mes connaissances au cours de 6 séances (en ligne) les lundis soirs en janvier & février.

Pas de concepts abstraits, on entre DANS LA TÊTE DU SKIPPER en décryptant 3 navigations (pleines d’imprévus).
> Traversée de la Manche : Oostende – Londres (séance 1 & 2)
> Traversée du Golfe de Gascogne : Concarneau – La Corogne (séance 3 & 4)
> Une semaine au départ de Skiathos, en Grèce (séance 5 & 6)

Arrêtez de rêver. Apprenez à naviguer.

Mini guide navigation Danemark – Copenhague

Quelques notes pour l’organisation de croisières au départ de Copenhague. Les ports en été sont souvent bondés. On finit à couple quasi chaque fois. Nous n’avons jamais pris d’emplacement entre des poteaux qui sont pourtant fort répandus. On ne fait pas attention à la marée (30cm) et au courant.

Dans beaucoup de marinas, des vélos sont à disposition. Pour les enfants, de très nombreuses et généralement belles plaines de jeux.

Au Nord de Copenhague 

  • Ven (Suède) – île de 4 km de long et 3 de large située à mi chemin entre Helsingør et Copenhague / Malmö. Le petit port de Kyrkbacken à l’ouest de l’île est charmant. Attention, il y a très peu de fond en arrivant, évitez avec de la houle. Quelques restos, loueurs de vélos, belle plage, se promener sur l’île qui fait penser à Belle-Île. (possibilité de prendre le bus). (9/10)
  • Humlebæk – petit port juste à 300 m du Louisiana Museum of Modern Art – musée mondialement reconnu. S’y arrêter quelques heures pour la visite du musée (chouette cafétéria avec vue) et continuer sa route. (9/10 si vous aimez les musées)
  • Helsingør (Danemark) – ville avec grand centre-ville – beau château – belle plage jusqu’à côté de la marina. Grand ponton visiteur juste à l’entrée de l’enorme marina, sanitaires médiocres par conte. La ville vaut le détour et le glacier Brostræde Is est exceptionnel. Il y a 1-1,5 kts de courant devant Helsingor – un peu difficile à prévoir dans quel sens … (9/10)
  • Gilleleje (Danemark) – 13 MN de Helsingør. Station balnéaire cossue et grand port de plaisance. Chouette plage. Beaucoup de glaciers artisanaux, restos coffee shop. Animé la journée en été avec beaucoup de visiteurs d’un jour. (6,5/10)
  • Mölle (Suède) – tout petit port où vous finirez 4-5 bateaux à couple. Jardin avec ponton pour aller nager un peu plus loin. Quelques restos branchés. Pas grande chose à faire – ou bien grande balade vers parc naturel au nord (3hr aller retour). N’y allez que si sur la route plus au nord. (5/10)

Au Sud de Copenhague

  • Malmö (Suède) – la Dockan marina n’a pas beaucoup de charme et son entrée est très exiguë. Cependant Malmö est une super ville, avec un centre-ville animé. Possibilité de louer des vélos à la gare ou à la marina. (9/10)
  • Skanör – 20 MN au sud de Malmö – station balnéaire avec un charme certain (pas la marina en elle même), surtout sous le soleil. Prendre des vélos à la marina et roulez vers le sud à travers les dunes. C’est magnifique. Ensuite se baigner avec les suédois le matin depuis les pontons derrière les cafés. Ne pas arriver trop tard pour une place sympa. (8/10 avec du soleil et si on aime les plages et les dunes)
  • Rødvig (Danemark) – escale purement pratique. Port de pêche un peu en manque de dynamisme. Magnifique balade entre les champs et la crête des falaises. Évitez la nourriture au café marina (5/10)
  • Copenhague – accès par le sud est compliqué car en travaux. Suivre des bouées jaunes à bâbord et les éoliennes à tribord. La carte est en pleine évolution parce qu’ils font des travaux dans tous les sens. À éviter de nuit.
  • Langelinie – a 100 m de la petite sirène. Pour la manœuvre à Langelinie. Se focus sur se caler entre 2 bateaux plutôt que d’arriver lentement pour passer l’amarre dans la bouée. Utiliser ancienne drisse de spi comme longue amarre sur la bouée. Arriver entre 9 et 11h le matin si vous voulez une bonne chance d’avoir une place les wks d’été. A 11h20 – au moment d’écrire ces lignes – 3 bateaux attendent une place. Possibilité de s’amarrer à la bouée jaune au milieu de la marina pour attendre. Possibilité de venir en voiture sur le quai de Langelinie. Il faut arriver par le côté nord et passer sur un tout petit pont de 2,5m de large.
  • Si la langelinie est rempli – allez un peu plus loin au ponton Olefia Plads – encore plus près du centre mais à couple et moins calme.

Sur la côte Ouest de Sjaelland

  • Marstal sur l’île de aéro – charmant village typique. Très calme. (7/10)
  • Svendborg sur l’île de Odense – magnifique et plus animé.
  • Reersø – très calme – un peu isolé (3/10)

Déboucher WC Marin Jabsco

Impossible de pomper ! La hantise de tout skipper. Malgré plus de 20 ans de navigation, c’est une des premières fois où j’ai les wc bouchés à mon bord. 

Ce petit article « plus léger » est une manière de documenter mon apprentissage et a une vocation pédagogique à l’intention de tous mes futurs équipiers. Il concerne le wc marin manuel jabsco. Modèle le plus répandu sur nos voiliers. 

J’avoue que j’étais un peu pris au dépourvu lorsque notre wc s’est bouché. J’ai pas mal cherché en ligne des explications, qui parfois étaient alarmistes voire même loufoques. Peu expliquaient de manière structurée comment s’y prendre. La meilleure vidéo explicative trouvée est celle-ci

WC marin Jabsco manuel

Qu’est-ce qui coince? Et où ?

Je vois trois causes principales pour des toilettes bouchées.

  • Accumulation de « dépôts de struvite ». La struvite est un minéral formé principalement de phosphate d’ammonium magnésien, qui peut se précipiter lorsque l’urine entre en contact avec l’eau de mer, particulièrement dans les systèmes de plomberie des WC marins.
  • Obstruction due à un surplus de papier ou de serviettes hygiéniques. Ou autre chose qui n’a rien à faire dans un WC marin.
  • Problème mécanique, type défaillance du piston, des joints de pistons, des clapets en cuivre dans la pompe, etc.

En partant de la cuvette, l’obstruction peut avoir lieu dans différents endroits, entre autres

  • Clapet en cuivre dans le mécanisme de pompe
  • Joint de soupape
  • Caoutchouc broyeur
  • Coude tuyau d’évacuation
  • Tuyau d’évacuation (qui peut devenir dur comme du béton avec des dépôts de struvite)
  • Sortie de la cuve à eaux noirs

Bonnes pratiques utilisation WC Jabsco

Avant de s’attaquer au débouchage, rappelons quelques bonnes pratiques à suivre pour éviter des mésaventures

  • Aucun papier dans la cuvette – toujours dans une poubelle séparée. Le papier abîme surtout les joints de la pompe.
  • Rincer abondamment (20 coups) après chaque usage pour éviter dépôts de struvite
  • Faire des coups de pompe à petite amplitude – pas jusqu’en butée pour ne pas abîmer le mécanisme 
  • Remplir la cuve et les tuyau à l’eau douce avant de quitter le bateau en fin de sejour pour éviter dépôts de struvite
  • Vider la cuve à eaux noires très régulièrement – idéalement quand on est au large (2 MN des côtes de mémoires)
  • Nettoyage préventif en fin de saison 

Approche étape par étape pour déboucher

Le WC marin Jabsco est bouché, voici comment je m’y prendrais étape par étape , sur mon bateau, en priorisant les étapes faciles. Vous aurez besoin d’une clef à molette, de tournevis plat, vinaigre blanc, gants de vaisselle pour l’hygiène, et éventuellement liquide déboucheur et un furet.

  1. Vérifier l’ouverture des vannes prise eau de mer et évacuation. Et oui…
  2. Vérifier fonctionnement clapet switch admission eau / évacuation 
  3. Vérifier remplissage cuve eaux noires, soit via cabine, soit via le pont et l’ouverture du bouchon « Waste ». Si la cuve à eaux noires est remplie, trois possibilités. 1) Pomper avec une pompe évacuation eaux noires dans un port. 2) Mettre du produit déboucheur type destop dans la cuve (en plastique). 3) Et enfin utiliser un furet de plomberie et entrer via la sortie (passe coque dans l’eau). Un cintre peut aussi faire l’affaire. 
  4. Démonter le mécanisme de piston. Utiliser une clef à molette pour tourner la pièce (pas les 6 vis encore à ce stade). Cette étape permet de vérifier si le piston est en bon état. Si les différents joints sont bons. 
  5. Ensuite dévisser les 6 petites vis du capot du mécanisme. Avant de soulever le capot, mettez le clapet switch en position admission eau. 
  6. Il est probable qu’à ce stade, rien ne soit résolu. En effet, s’il s’agit d’une obstruction, elle sera souvent dans le joint de soupape ou dans le caoutchouc broyeur. 
  7. Dévisser les 2 vis qui tiennent le tuyau d’évacuation à la pompe manuelle. Placer un sac plastique judicieusement en dessous pour récupérer le liquide (probablement brunâtre) qui va en sortir. Vous avez maintenant accès au caoutchouc broyeur et aurez déjà une bonne idée. 
  8. Dévissez les 4 vis qui tiennent le pied de la pompe. Prévoyez de quoi absorber le liquide qui va inévitablement s’échapper. Vous avez maintenant accès au joint de soupape. Dans mon cas, ce joint et le caoutchouc broyeur étaient complètement bloqué par des dépôts de struvite. 
  9. Faire baigner les différentes pièces dans du vinaigre blanc et gratter la struvite sans abîmer les caoutchoucs. Gratter les entrées / sorties de la pompe et tuyau, plus que probablement remplis de struvite. 

Ca y est – les wc sont débouchés. J’ai donné de ma personne, avec un peu d’entraînement le démontage et remontage prend une heure. Dans mon cas, c’était bien l’accumulation d’années de dépôts de struvite qui étaient à l’origine du blocage du caoutchouc de soupape et du broyeur. La pompe pour évacuer devenant de plus en plus dur. C’est un signe à prendre en compte au moment de planifier les travaux de l’hivernage. 

Une fois tout remonté, il reste deux petits problèmes:

1) micro fuite via une vis à la base de la pompe – je vais remettre du silicone 

2) micro fuite via la tige de la pompe – faut acheter le bon joint

Amsterdam – Copenhague sous le soleil

Après la Norvège l’été dernier, Papa Charlie continue son exploration des pays scandinaves. La base de départ pour l’été est Copenhague. La destination a été choisie pour se donner la possibilité d’y aller en voiture ou train. Même si les connexions de train en Allemagne laissent à désirer.

Qui dit destination lointaine, dit convoyage, dit mission commando pour amener notre voilier d’Amsterdam à Copenhague en une semaine. Alors que la navigation vers la Norvège peut s’effectuer d’une seule traite à travers la Mer du Nord, la navigation vers la capitale danoise est nettement plus contrainte par de nombreux obstacles: Les mers intérieures hollandaises IJsselmeer et Waddenzee. La côte nord des Pays-Bas et de l’Allemagne jusqu’à l’embouchure de l’Elbe. Le canal de Kiel. Enfin, la mer Baltique entre les îles danoises.

Julien et moi sortons du train à Enkhuizen (au nord d’Amsterdam) et l’ambiance est estivale après un printemps morose. La ville est mignonne. La gare et le port de plaisance sont en centre-ville. On largue les amarres sous un beau soleil et une jolie brise. Quatre heures plus tard, Papa Charlie franchit l’écluse Lorentzsluis et passe du IJsselmeer dans le Waddenzee. J’hésite sur la route à suivre. S’arrêter ? Continuer ? On passe à 21h devant Harlingen et on enchaîne par le redouté Pollendam jusqu’à Vlieland. Le courant de travers y est relativement fort. Jusqu’à trois nœuds. On avance au moteur (obligatoire) et en crabe (de travers pour étaler le courant). Le soleil se couche à 22h15 mais la clarté ne disparaît pas vraiment en ces jours de solstice d’été. À 23h30 on s’amarre pour quelques heures dans le port de Vlieland. Comme à son habitude, le port est bondé. On se met à couple d’un voilier et filons dans notre couchette.

Après cinq petites heures de sommeil, le réveil pique. En cinq minutes à peine, on est déjà en route. C’est l’avantage de naviguer en équipage très réduit. La lune pleine à l’ouest disparaît tandis que le soleil apparaît au nord-est. Des fêtards profitent du spectacle depuis la plage sur un fond de musique.

Malheureusement la brise est trop faible et on fera les 120 MN jusqu’à Helgoland au moteur… mais sous un soleil radieux. Avec Julien, on se relaie à la veille et à la sieste. On voit des milliers d’éoliennes et quelques plateformes de gaz. J’anticipais un traffic soutenu dans les rails de cargo que nous longeons mais il n’y seulement que quelques navires marchands.

Taboulé à midi. Pâtes pesto lardons le soir. Arrivée à 23h30 à Helgoland. Le port est bondé et on trouve une place à couple. Les occupants sortent et nous préviennent qu’ils partent à 6h le lendemain. C’est difficile d’expliquer la sensation qui m’envahit en menant l’étrave de mon bateau jusqu’ici. Helgoland est certes moins connues que les îles Scilly, Guernesey Gotland ou les Shetlands, elle fait partie des îles mythiques pour tout marin en Europe du Nord.

Toc toc toc. Nouveau réveil qui pique. Nos voisins se mettent en route. On enfile un short et t-shirt et bougeons Papa Charlie pour les laisser partir. Douche qui fait du bien. On s’incruste gentiment pour un buffet petit dej à volonté dans un hôtel sur le port (Hotel Rickmers Insulaner). C’était le seul établissement ouvert avant l’arrivée des touristes du continent prévue pour 10h.

L’île d’Helgoland (ou Heligoland) est située à l’embouchure des fleuves de l’Elbe et Weser, donnant accès aux ports allemands comme Hambourg et Brême. L’Allemagne en a récupéré la souveraineté en 1890 en l’échangeant contre Zanzibar avec les Anglais. La petite île ne fait que 2 km de long et après une balade jusqu’à la pointe nord et un café dans la mignonne petite bourgade (1.100 habitants), on reprend la route jusqu’à l’entrée du canal de Kiel. 50 MN au moteur. Le courant favorable nous propulse à 8, 9 puis 10 nœuds. Le vent se lève enfin en arrivant à Cuxhaven. On sort les voiles et Papa Charlie rugit de bonheur. On passe devant l’usine Siemens qui produit des pales d’éoliennes.

15 MN plus loin. Brunsbüttel. C’est là que le fameux Nord-Ostsee-Kanal commence – en Mer du Nord – pour finir 100 km plus loin, à Kiel. En Mer Baltique. Une petite cinquantaine de bateaux de plaisance patientent depuis des heures devant les écluses qui s’ouvrent comme par miracle au moment où on arrive. On célèbre cela avec un apéro, une baignade dans le canal et un bon repas … de pâtes. Julien prend son rôle de cambusier avec beaucoup de sérieux, et chaque repas est un réel plaisir gustatif. C’est aussi un vrai luxe et une charge mentale en moins de ne pas du tout devoir m’occuper des repas ni de la vaisselle (pour tout le voyage ou presque). Merci Julien (et Seb).

À cette période, la navigation pour les navires de plaisance est autorisée jusqu’à 22h sur le canal. On s’arrête un peu avant au milieu des champs, à une écluse donnant accès au Gieselau Kanal.

Réveillés par un bruit de tronçonneuse, on est de nouveau en route en à peine 3 minutes. Il nous reste une petite vingtaine de milles jusqu’à la sortie du canal. On s’arrête à Rendsburg pour un café (praliné) ainsi que pour refaire quelques courses. Il n’y a que 4-5 ponts tout au long des 100 km du canal de Kiel. Certains ponts à treillis sont des magnifiques ouvrages. Le viaduc ferroviaire de Rendsburg fait partie des monuments techniques les plus remarquables d’Allemagne. Il a été construit entre 1911 et 1913 et fait partie de la ligne ferroviaire vers le Danemark. Mais ce qui rend ce pont en acier très particulier, c’est la nacelle du ferry aérien suspendue à sa partie inférieure. Elle permet aux cyclistes et piétons de passer d’une rive à l’autre.

En arrivant aux écluses de sortie, nouvelle chance de fou. Elles s’ouvrent devant nous tandis qu’une trentaine de voiliers énervés s’entassent dedans. Notre voisin d’écluse patientait depuis 2h30 ! Arrivé en Mer Baltique, on fait escale très brièvement à Kiel. Sébastien a à peine le temps de déposer son sac qu’on repart, direction le Danemark !

La baie de Kiel, haut lieu de la voile allemande, nous offre son plus beau spectacle. Plusieurs centaines de voiliers tirent des bords sous le soleil. Une dizaine de vieux gréements sont également de sortie pour la tall ship race qui y est de passage.

Les navires disparaissent à l’horizon tandis qu’on fait route plein nord à plus de 7 nœuds au près. Julien nous prépare des burgers incroyables.

Le soleil est déjà couché depuis longtemps lorsqu’on arrive à Marstal, sur la petite île de Ærø. On finit la soirée au pub, la propriétaire nous vendant des cocktails à 15 €. Bienvenue au Danemark – tout pique au portefeuille.

Mercredi matin. La recherche de la boulangerie dans le village plutôt mignon est vaine. On règle les droits de port, faisons le plein de fuel avant de reprendre notre route. Le vent est trop faible et on fait trop de moteur. On longe Langeland puis passons sous le pont du Grand Belt (sous spi). Un nouvel ouvrage imposant qui ne laisse l’architecte du bord – Julien – pas insensible. Seb s’assure qu’on fasse escale à l’heure à Reersø pour voir le match des diables à l’Euro 2024. Seb part en balade et en mission pour finir les courses. Julien fait un petit jogging. Je fais un tour en standup paddle. On regarde ensemble le magnifique 0-0 des diables face à l’Ukraine.

Nouveau réveil piquant vers 5h (je vous assure que ce n’est pas de la torture mais que du bonheur). Les voiles hissées, je retourne dans ma couchette finir ma nuit pendant encore deux bonnes heures. Le vent est très favorable pour les 80 MN du jour. On contourne l’île de Sjælland – île principale du Danemark – par le nord pour s’arrêter en fin de journée à Gilleleje, station balnéaire huppée.

Vendredi. Pour notre dernière journée de navigation, le temps se gâte et on voit nos premiers nuages du voyage. Jusque là c’était crème solaire de 7h à 21h. Des grains orageux. De la pluie. Du vent qui monte à 30 nœuds. On s’arrête au célèbre musée d’arts modernes – Louisiana – pour la pause du midi. L’arrivée à Copenhague est plutôt rock’n roll car elle coïncide avec un nouveau grain violent. Le vent monte de nouveau pendant qu’on tourne en vain dans le Nordhavn à la recherche d’une place de port. On se rabat sur le nettement moins sympa Svanemøllehavnen pour finir la journée au Nyhavn. Fish and Chips et Irish Pub avant de rentrer en métro.

Dernier jour. Après un nettoyage approfondi du bateau, on loue des vélos pour la journée. Julien devient « source » et nous fait découvrir différents quartiers et bâtiments modernes à travers la ville, entre autres des appartements avec énormes terrasses vertes au-dessus d’un parking, des silos convertis en logement ou encore l’incinérateur surmonté d’une piste de ski.

Après 30 km de pédale, une petite sieste et douche à notre hôtel fait le plus grand bien. Seb devient source pour la suite. On va d’abord à Christiania – ancien quartier hippie, ensuite resto italien, et enfin LE bar pour assister au match Danemark-Allemagne en compagnie de plusieurs centaines de Danois. Le but danois sera malheureusement annulé et ils encaisseront ensuite deux buts. La fatigue nous rattrape et on s’éclipse tandis que la fête bat son plein. La mission est accomplie. Papa Charlie est pour deux mois au Danemark pour le plus grand bonheur de ses Co-skippers. Merci Seb. Merci Juju. Vous avez été un équipage de rêve.

Solo

Dieppe. Dimanche midi. Le soleil est de plomb. La brise légère. Je largue les amarres et salue la famille restée sur le ponton. Je me suis fixé le défi de naviguer en solitaire jusqu’en Belgique. 135 milles nautiques.

Le ferry DFDS qui assure la liaison Dieppe – New Haven (Angleterre) part au même moment que moi. Papa Charlie fait quelques tours dans le chenal pour laisser passer le mastodonte avec 200 passagers à bord (entendu à la VHF). Je range les pare-battages et les amarres. Pendant que les nombreux touristes sur les quais, profitent de la vue, j’appréhende quand même un peu. Comment vais-je gérer le sommeil ? Comment vais-je gérer l’accostage dans les ports ?

Papa Charlie progresse à la voile pendant les deux premières heures. Ensuite le vent tombe et on continuera au moteur jusqu’à Boulogne (50 milles nautiques depuis Dieppe). Les conditions sont très faciles, et il n’y a pas un bateau à la ronde, j’enchaine trois petites pauses de 10 minutes. Je mets mon réveil et un rappel bien fort sur mon téléphone. Ensuite je m’allonge dans la cabine. Le sommeil ne vient pas. Pas assez fatigué, et pas assez détendu pour m’endormir. Après 7-8 minutes, je remonte pour reprendre la veille. Le temps est long et la navigation est facile. Je mange pour m’occuper.

L’arrivée sur Boulogne vers 20h30 se fait en douceur. Je prends une place en bout de ponton. Un plaisancier allemand prend mes amarres. Je prends une douche, revois la météo et l’itinéraire pour la suite de la route. J’essaie de trouver le sommeil vers 23h.

A 2h45, l’alarme de mon téléphone sonne et me réveille en sursaut.  C’est bientôt la bascule de courant et il faut se mettre en route. Je me prépare un thé dans un thermos. Dix minutes plus tard, je suis seul dans le chenal de Boulogne. La nuit est noire. Le vent est plus fort que prévu. Vingt, vingt-cinq nœuds. Je hisse la GV haute, mais garde quelques tours dans le génois. J’ai une boule au ventre. C’est le stress. L’appréhension. Hier après-midi c’était facile, maintenant cela devient sérieux.

Je passe le phare à l’entrée du port et rapidement il disparait. Je reprends doucement confiance en moi et en mon bateau. J’ai peur de me prendre un coffre ou filet de pêcheur. Il y en avait tellement autour de l’entrée du port. Le bateau accélère. Sept. Huit. Neuf. Dix nœuds. Papa Charlie déboule à dix nœuds sur le fond dans l’étroite bande de 2 milles nautiques entre les falaises et les rails de cargo. L’euphorie m’emporte. C’est pour cela qu’on navigue. Pour cela qu’on vit.

Une bonne heure après notre départ, Papa Charlie passe le cap Gris Nez et son phare (un éclat toutes les 5 secondes) sur tribord. A bâbord, les cargos nous dépassent dans le rail remontant. Un ferry venant de Douvres coupe le rail et fait route sur nous. Un pêcheur zigzag devant. La nuit est noire mais tout est bien visible. Et l’AIS facilite l’identification des navires.

Après un empannage au Nord de Gris Nez, Papa Charlie maintient sa vitesse fond au-delà de neuf nœuds pendant trois bonnes heures. J’enchaîne les thés et soupe minute pour me réchauffer et me tenir éveillé. Le jour se lève. La fatigue arrive. Vers 9h15 je m’amarre au port de Dunkerque. Le vent est tombé et le courant sera bientôt contraire. Je travaille un peu dans un café du centre-ville avant de retourner au bateau. Ma tentative de sieste sera veine. Papa Charlie repart trop tôt (courant encore contraire) pour la dernière étape de ce périple. Destination Zeebrugge.

Après 2-3 heures au moteur contre le courant, la renverse coïncide avec l’arrivée d’un gros nuage sur la côte. Ce nuage génère un fort vent de travers (venant du sud-est). Papa Charlie retrouve des vitesses à deux chiffres ! Je choque pour ne pas partir au lof… Zeebrugge se rapproche à vitesse VV prime. Arriverai-je à temps pour rentrer déjà ce soir ? La brise, annoncée par aucun modèle météo (arôme, EMCW, GFS), nous pousse jusqu’à Zeebrugge. Devant Oostende, on croise une dizaine de bateaux qui reviennent des parcs éoliens.

A ma grande surprise, la marina de Zeebrugge est vide. Plus de la moitié des emplacements sont vides. Papa Charlie y restera seul pendant quelques jours et je veux choisir un emplacement sécurisé. Je manque presque ma manœuvre d’approche. Le vent soufflant toujours fort. Je commets l’erreur de choisir une place au vent. Au lieu de prendre une place sous le vent et de me laisser dériver. En descendant du bateau, l’amarre que j’ai en main s’accroche à la filière et tombe à l’eau. Impossible de la reprendre et le bateau pivote déjà sous l’effet du vent. Heureusement, j’arrive à prendre l’amarre à l’avant du bateau et parvient à le ramener sans problème. Petite frayeur. Grande leçon.

Le rangement du bateau est pénible. C’est là que la solitude se fait le plus ressentir. Une fois dans le train pour Bruxelles, je ressens enfin la satisfaction de cette première réussie.

Quels livres de voile offrir? (pour Noël)

Après une dizaine de semaines de navigation, un formateur me donna un jour le conseil de travailler sur ma culture nautique en lisant quelques livres. Lire des livres ne remplace pas l’expérience de la navigation, mais cela permet de mettre en perspective ses propres expériences. Oui, tous les marins se sont jurés de ne plus jamais retourner en mer un jour, en pleine galère…

Depuis ce jour où j’ai reçu ce conseil, j’ai dévoré plusieurs dizaines de livres nautiques et voici ma petite sélection, de quoi vous inspirer si vous souhaitez faire un cadeau à un ami passionné de mer.

1. Le fondateur – La longue route – Bernard Moitessier

Bernard Moitessier, né en 1925 au Vietnam, est un aventurier pur-sang. Dans la période d’après-guerre, il est un des premiers Français à partir au large pendant de longs mois. C’est tout naturellement qu’il participe au premier Golden Globe Challenge lancé par la BBC. Dans le livre La longue route , il raconte son aventure à bord de Joshua, sa goélette à la coque rouge, lors de cette première course autour du monde en solitaire. Plutôt que de terminer la course, il décide de continuer vers Tahiti, illustrant sa quête personnelle et sa connexion profonde avec la mer.

Dans Vagabond des mers du Sud, Bernard Moitessier raconte son périple de Tahiti jusqu’à l’Europe sans escale avec son épouse Françoise

2. Le plus prenant – Soudain, seuls – Isabelle Autissier

L’autrice Isabelle Autissier a eu plusieurs vies. D’abord coureuse au large à succès notamment en IMOCA, elle embrasse ensuite une carrière militante écologiste (notamment la présidence de WWF France), en parallèle de l’écriture de plusieurs romans. Ils sont tous très bons, mais Soudain, seuls est un chef-d’œuvre. Un couple de trentenaires parisiens part en tour du monde et explore le sud de l’Océan Atlantique à bord de leur petit voilier… seulement tout ne se passe pas comme prévu…

3. Sur la table de chevet – La 8ème édition du cours des Glénans

Un peu l’indispensable bible de tout marin. Ce n’est pas un livre qui se lit de la première à la dernière page, mais un livre pédagogique qui apporte tous les fondements de la voile. A offrir à quelqu’un qui s’y met ou qui a décidé de s’y mettre.

4. Le plus formateur – Météo locale et stratégie – Jean-Yves Bernot

Le routeur de François Gabart, Jean-Yves Bernot a une énorme expérience du large et de la navigation en course. Son dernier livre, sorti en juin 2023, est vraiment passionnant. Jamais je n’aurais cru apprendre autant dans un bouquin si gros. Ce livre n’est pas conseillé aux personnes qui n’ont pas une sérieuse expérience de la navigation.

La météorologie locale est la réponse d’un site aux conditions météorologiques générales. On cherche à utiliser ces effets locaux pour prendre l’avantage en course, augmenter le confort de la navigation en croisière, ou tout simplement pour avoir le plaisir de naviguer astucieusement dans un milieu complexe.

5. Le plus aventurier – L’enfant des sept mers – Paul-Loup Sulitzer

Kaï O’Hara est un jeune adulte impulsif à la tête d’une goélette à la voile qu’il a hérité de son grand-père. Il navigue avec le Nan Shan sur les sept mers en Asie du Sud-Est. Son équipage d’Ibans coupeurs de têtes, parmi lesquels l’Oncle Ka, est craint par tous les pirates de la zone.

Ce livre n’est plus vendu mais a marqué mon enfance et donné le goût de l’aventure et du large. J’ai bien dû le lire 10 fois !

N’hésitez pas à commenter le livre que vous offrirez pour Noël !

Passer son « permis bateau » (français et belge), est-ce bien utile et raisonnable?

Régulièrement, on m’aborde en me disant, « je passe mon permis bateau le week-end prochain ». C’est un peu une étape symbolique pour le trentenaire ou quarantenaire qui découvre une nouvelle passion. Cependant, c’est souvent pour moi signe d’une faible expérience de la mer.

Ayant navigué plus de 40.000 milles nautiques sur des voiliers, principalement en Mer du Nord, Manche et Atlantique, je me permets quelques réflexions sur le permis bateau.

Passer le permis bateau français

Le permis français ne vaut strictement rien en terme de compétences nautiques. On paie, on passe un examen caduc, on reçoit un papier.

Exemple annonce permis bateau en France


Ce permis bateau (français) est utile pour louer des bateaux moteurs partout dans le monde. Soyez cependant prudents. Vous n’avez acquis aucune compétence et vous emmènerez les êtres qui vous sont les plus chers en mer, un milieu hostile, potentiellement dangereux. Même à 500 m de la côte, le danger est présent. Un ami, marin chevronné, a failli y passer à 500m au large de Knokke… D’autres sont morts à 300 m de la côte en Grèce.

Clarisse Crémer, 12ème du Vendée Globe en 2020, n’avait même pas passé son permis bateau avant de partir en tour du monde en solitaire.

Ce permis bateau français est absurde et juste un permis « business », son taux de réussite est de 99% après seulement quelques heures de formation.

Le permis « yachtman » belge

Le système belge est devenu les dernières années beaucoup trop difficile. Il est inutilement complexe, cher, et trop théorique. J’ai renoncé à essayer de le comprendre en détails. Des heures de théories pendant lesquelles on apprend des concepts hypers compliqués, notamment la navigation sur l’Escaut (et ses règles très particulières) et le fonctionnement des ondes radios… le tout pour à la fin, ne toujours pas savoir vraiment naviguer. Heureusement, quelques sessions en mer ont été ajoutées…

Dans une école bruxelloise, moins de 10% des élèves ont tenu jusqu’au bout de la quinzaine de sessions de théorie et réussi l’examen. Le pire, le brevet de yachtman n’est pas vraiment reconnu à l’étranger.

14 soirées de ~3 heures, avec chaque fois 2 thèmes


Quel permis pour louer un voilier ?

Pour louer un voilier – un cv nautique est suffisant presque partout dans le monde. A la rigueur vous partagez un numéro de membre de club de voile ou autre. Je n’ai pas de permis à proprement parler, mais j’ai déjà loué des voiliers en France, Martinique, Grèce, Croatie, Espagne, etc.

Ma conclusion, passer le permis bateau, c’est utile pour louer un jetski (bof bof le climat & les voisins), ou une barque motorisée sur un lac, par une belle journée,

🙂 c’est mon avis & mon expérience.

Si vous êtes motivé, première étape est probablement d’acheter le cours des Glénans.

La seconde étape, s’inscrire à la formation « Dans la tête du skipper »

Convoyage retour – Norvège – Pays-Bas sur un bord de 450 MN

Prendre l’avion s’est encore avérée une expérience chaotique et particulièrement désagréable. Après un arrêt sprinté à Amsterdam, on arrive à Stavanger et rejoignons le brave Julien qui a rempli le fond de cale de victuailles pour la traversée. Le bateau est amarré dans la petite marina de Børevigå, à quelques centaines de mètres du centre-ville de Stavanger et à côté du musée du pétrole. Ne cherchez pas de maître du port, il n’y en a pas. On paie via l’application GoMarina et on reçoit le code d’accès aux sanitaires.

La mission pour la semaine est simple, ramener notre oceanis 40 Papa Charlie de Norvège jusqu’en Zélande. Il y a 480 MN (=900 km) en ligne droite. Soit 4 jours de navigation si les cieux sont cléments. L’équipe est chevronnée. Philippe qui skippe régulièrement le bateau et est un marin de grande expérience. Julien & Thibaut qui sont des habitués. Ils ont notamment participé au convoyage inaugural épique/mythique en décembre entre le Crouesty et Nieuwpoort.

Après un petit briefing à bord, on se dégourdit les jambes dans Stavanger. Pas de bateau de croisière amarré aujourd’hui. La ville est calme pour un samedi après-midi. On est tous les quatre d’accord pour dire que Stavanger, 3ème ville de Norvège, est plus sympa que Bergen. Plus authentique et moins touristique. Après un apéro à bord, on mange des curry et butter chicken chez Zouq, mon restaurant pakistanais préféré de Norvège. A 21h tout le monde est au lit.

Réveil 7h en ce dimanche. On largue les amarres à 8h15 pendant que le Queen Mary II, bateau de croisière mythique de la compagnie Cunard, s’amarre au centre-ville. Jusqu’à midi, la légère brise venant du large n’est pas suffisante pour progresser à la voile. Elle bute contre le relief de la côte. On appelle cela l’effet coussin.

Les premières 36h sont très favorables. Le vent d’ouest varie entre 8 et 15 nœuds et Papa Charlie avance entre 5 et 8 nœuds. L’équipage s’impatiente de voir les plateformes pétrolières promises. On navigue pendant de longues heures sous gennaker au portant au soleil sur une mer plate. On affale cette grande voile de portant par précaution lorsque la nuit tombe. Menu du midi: pâtes brocoli chèvre gruyère. Menu du soir: wraps.

La première nuit est noire. La lune pleine et orangée disparaît très tôt et on avance dans l’obscurité totale. Nous passons enfin à côté d’une première plateforme. Elle ressemble à un sapin de Noël avec toutes ses lampes et sa torchère au sommet. A l’AIS, on peut voir quatre bateaux stationnés autour. Papa Charlie continue sa route rectiligne. Cap au 195° (sud-sud-ouest).

La journée du lundi est rythmée par le passage de grains. Les grains – nuages monstres – visibles à l’horizon s’approchent lentement avant de surgir subitement. Le vent monte de 10 à 20 nœuds et nous force à manœuvrer. On réduit la puissance de la grand-voile en lâchant le hâle bas et choquant l’écoute. Le génois est enroulé de quelques tours. Enfin on abat d’une vingtaine de degrés pour réduire le vent apparent. Les trois grains du jour nous arrosent mais passent facilement. A midi on mange poulet courgette quinoa. Le soir poulet courgette pâte pesto. Chaque fois avec du topping de gruyère.

Le vent s’écroule à la fin de cette deuxième journée et on passe la soirée et la nuit au moteur. Julien & Philippe font quelques tentatives d’avancer à la voile. Mais sans résultat autre que de réveiller le quart qui se repose.

A minuit, Thibaut et moi montons sur le pont. La lune est beaucoup plus haute que la nuit précédente. C’est un véritable spot qui réfléchit sur la mer. Vers deux heures du matin la lune disparaît, et les étoiles brillent d’autant plus par cette nuit sans nuages. Au loin, sur l’arrière bâbord, une torchère de gaz crée un halo rose.

Depuis le départ, nous avons effectué de nombreuses manœuvres à la voile (hisser, affaler, dérouler, enrouler), mais n’avons pas encore viré ou empanné de bord. C’est-à-dire que les voiles sont, et resteront jusqu’aux Pays-Bas, à bâbord. Le vent venant de tribord.

Au matin, le vent rentre du sud-ouest et on entame un long bord de près. La gîte use les organismes. Manger s’habiller se déplacer. Toutes ces choses anodines sont compliquées. A midi, je prépare un risotto saucisse petits pois lentilles. C’est étonnamment le premier repas que je prépare. L’équipage ayant bien assuré jusqu’ici. La journée suit son cours tranquille au rythme des variations de vents. Nous passons – enfin – près d’énormes et nombreuses plateformes gazières. Un hélicoptère se pose même sur l’une d’elles alors qu’on passe à côté.

La troisième nuit est éreintante. Un front chaud (?) arrive. On enchaîne les grains qui sont nettement plus violents que la veille. Ces immenses nuages déversent des torrents d’eau sur nous. Le vent passe de 5 à 30 nœuds en quelques secondes. De rien à tout. On réduit puis on renvoie de la voile toutes les trente minutes. La mer désordonnée nous fait danser avec elle. Sauter avec elle. Valdinguer dans tous les sens. Après trois plats à la sortie d’une vague, Philippe change la couchette avant pour la couchette stratégique et confortable à l’arrière tribord.

Je reste à la barre pendant trois bonnes heures. L’adrénaline m’empêche toute façon de dormir et tout mon corps est tendu. Crispé. Il y a beaucoup trop de lumières non identifiées à l’horizon. On devine de nouveaux grains dans la nuit noire car très nuageuses. Après le front, le vent « prend de la droite », il tourne de SW à WNW (sud-ouest à ouest-nord-ouest). Le bateau se retrouve au portant est commencer à foncer. Cap au 180°.

Au matin. On est un peu groggy. Pas le temps de se déconcentrer. La côte hollandaise est toute proche. Elle est piégeuse à cause de son trafic et ses zones interdites. Vers 8h, au moment où je sors de ma couchette, ce sont quatre bateaux commerciaux qui passent derrière nous. Ils font route vers Ijmuiden (Amsterdam).

Avec le courant favorable, nous traçons à 9 nœuds entre Amsterdam et Rotterdam. Ce qui est surprenant ce sont encore et toujours des plateformes gazières. Cette énergie du passé contraste avec les milliers d’éoliennes construites et encore en développement.

Grâce à notre vitesse élevée, nous passons sans encombres les chenaux d’entrée du porte de Rotterdam. Des centaines de navires sont à l’ancre. Vides, ils attendent leur prochaine cargaison.

Après Rotterdam, il nous reste une vingtaine de milles jusqu’à l’écluse du Roompot puis l’Oosterschelde jusqu’à Wemeldinge. On se détend et grignotons sur l’heure de midi. Le plus dur est derrière nous, se dit-on. Le courant s’inverse, on passe de 9-10 nœuds à 6-7 nœuds. Le vent contre le courant fait lever la mer. Le chenal jusqu’à l’écluse est beaucoup plus étroit, long et piégeux que dans mes souvenirs. 10 MN à serpenter entre des bouées peu visibles. Au moindre écart, on s’échoue sur un banc de sable.

A 16h on arrive devant l’écluse. Problème, la marée est trop haute, et la hauteur libre en dessous du pont est insuffisante pour laisser passer notre mât (19 mètres au dessus de l’eau). Nous grignotons les restes du frigo. Fromage. Jambon. Chips. Petite Bière. Puis on nettoie le bateau. A 18h, l’éclusier (à distance), nous confirme qu’il y a assez de place pour passer sous le pont. Il reste encore 18 MN jusqu’à Wemeldinge, mais avec 1,5 nœuds de courant contraire. Au lieu de progresser à du 5-6 nœuds, on se traine à 3,5.

Des grains réapparaissent au loin. Je réfléchis tout haut à affaler la grand-voile haute, et continuer au moteur. Un magnifique nuage apparait sur notre arrière tribord. Thibaut et Julien vont au pied du mât pour affaler la GV quand une rafale à 35 nœuds arrive. Je leur crie de s’agripper. Trente-cinq nœuds. Papa Charlie se couche sur son flanc tribord. Thibaut se tient au mat et Julien aux filières bâbord. Philippe réagit ensuite en choquant la GV. La voile bat dans tous les sens pendant qu’on la descend en catastrophe.

Après le vent, la pluie et la grêle. Philippe se met au poste de barre pour guider le bateau au moteur pendant que des trombes s’abattent. Réfugié à l’intérieur, je m’équipe pour intervenir au cas où. En arrivant à haute de Colijnsplaat, alors qu’on croit le grain passé, la foudre suivi immédiatement d’un coup de tonnerre déchire le ciel. On ne fait pas les malins. Fort heureusement, cela passe sans dégâts. Deux heures plus tard, la nuit bien entamée, on arrive à bon port. On file en catimini car demain matin, c’est boulot !

Comment choisir son système de quart pour des longues traversées?

2h, 3h, 4h, 5h, 6h? Tournant, roulant? Fixe? Variable? La question de comment organiser ses quarts lors de longues traversées revient inlassablement. La réponse dépendra de nombreux facteurs, comme

  • la taille et l’expérience de l’équipage
  • la durée & la difficulté de la traversée
  • le bateau
  • l’expérience, la confiance et l’endurance du skipper

Dans les paragraphes qui suivent, je vais partager mon avis en me basant sur les plus de 100 nuits que j’ai passées en mer comme skipper, lors de traversées de l’Atlantique, du Golfe de Gascogne, de la Mer du Nord vers l’Angleterre ou la Norvège, la mer de Chine vers les Philippines, ou encore la Manche.

Traversée de plusieurs jours au large

Imaginons un équipage de 4 personnes avec au moins 2 personnes capables de barrer par toutes les conditions et d’assurer la veille de nuit.

Système 6h/6h tournant

Lors de ma première transatlantique, nous n’étions que 4 personnes à bord. 2 jeunes expérimentés, et 2 seniors charmants mais un peu moins vaillants… surtout au vu des conditions affrontées dans le golfe de Gascogne fin octobre (30-40 nœuds au près pendant 4-5 jours). On avait opté pour un système de quart à 2.

  • 8h-14h – A (repas à 13h30)
  • 14h-20h – B (repas à 19h30)
  • 20h-2h – A
  • 2h-8h – B

Alors oui, les 6h de quarts, de nuit, c’est ultra fatiguant. Surtout quand le pilote ne tient pas vu les conditions de mer, la pluie horizontale dans les yeux, etc. J’avais même dû tenir un quart entier à la barre. Par contre, après, j’ai eu mes heures de repos, presque une nuit complète.

Système 4h/4h/libre

Mon système préféré les dernières années. Toujours avec un équipage de 4 personnes, il s’agit d’avoir 2 x 2 quarts de 4h pendant la nuit et le matin, et l’après-midi libre avec chacun au moins 2h à la barre.

  • 20h-0h – A
  • 0h-4h – B
  • 4h-8h – A
  • 8h-12h – B
  • 12h-20h – (repas à 12h30 et 19h) libre, chacun s’engage à prendre la barre au moins deux heures. On s’organise librement pour aller faire sa petite sieste.

Pourquoi je n’aime pas les quarts de 2h, ni les quarts roulant

Les quarts de 2h ou 3h sont à éviter s’il n’y a que 2 quarts. Le temps de se déshabiller, d’aller aux toilettes, de se mettre dans son duvet, et de trouver le sommeil,… il sera déjà presque l’heure de ré-enfiler son cirré pour monter sur le pont. Donc, évitez…

Et le skipper? Dans le quart ou hors-quart?

Durant mes premières années comme skipper, j’ai surtout navigué de nuit en côtier, avec un équipage dont je connaissais pas les compétences et surtout à qui je ne pouvais pas déléguer le suivi de la navigation. Dans ces conditions là, j’étais hors quart, je dormais dans le carré en ciré, et suivais les moindres mouvement. Je sortais au moindre doute. Je me rappelle, entre l’Irlande et les Scilly, le quart sur le pont échangeait sur des signaux lumineux visibles au loin. Clairement, ils ne comprenaient pas ce qu’ils voyaient, mais au moins ils étaient attentifs. Au bout de quelques minutes, ils m’appellent sur le pont. En 3 secondes je suis dans la descente. Et là, je vois un chalutier à moins de 200m. On fonce au portant à 8,5 nœuds (c’était un 45 pieds) vers son chalut derrière lui. Ni une ni deux. On envoie un empannage et on s’écarte de cette route de collision.

Hors quart. En ciré, dans le carré. J’étais tout le temps fatigué et décalé du reste de l’équipage. Je le déconseille fortement.

Maintenant, je vais systématiquement prendre le quart le plus pénible (0-4h du mat sur une récente traversée vers la Norvège) ou le quart qui va me permettre d’être sur le pont au moment de l’atterrissage (arrivée sur les côtes). Hors quart, j’enlève mon ciré et me faufile dans mon sac de couchage. Si la navigation ne me permet pas de dormir un bon quart, je mets mon réveil dans 30-60 min. Je raisonne toujours ainsi: danger à 10 MN / vitesse 5 nœuds, donc j’ai 2 heures avant un problème potentiel, je peux dormir 1h15-1h30.

Autres paramètres à prendre en compte: repas, vaisselle, décisions

Décider de son système de quart est toujours un moment délicat. Plusieurs équipiers ont leur avis et chacun a des expériences différentes. Je vous encourage à expliquer les paramètres, météo, fatigue, expérience de l’équipage, dangers, et de laisser l’équipage explorer les options. Il n’y a pas de mauvais systèmes (sauf le 3/3), ou les systèmes roulants trop rapidement (chaque jour un autre quart).

Lors des navigations en quart, la prise des repas ensemble (à midi et le soir) est le moment convivial par excellence. Veillez à vous mettre d’accord sur un certain principes. Qui prépare le repas (généralement le quart qui est sur le pont)? A quelle heure on mange (30 min avant le changement de quart)? Qui fait la vaisselle? A quelle heure réveille-t’on le quart suivant? Etc.

Convoyage entre Wemeldinge & Stavanger

On largue les amarres vers 11h ce samedi par un belle journée d’été. Grand soleil et légère brise venant du large. Après un arrêt rapide pour remplacer la dernière bonbonne de gaz au Goese Sas, on navigue au près vers l’écluse du Roompot.

Une fois l’écluse franchie, nous sommes « en pleine mer ». Les prévisions météorologiques s’avèrent malheureusement exactes. Le vent s’écroule et on doit progresser au moteur, jusqu’à Scheveningen – port de la ville hollandaise La Haye à 35 MN (milles nautiques) au Nord. A 23h, nous nous amarrons dans une partie quelque peu abandonnée du port et filons au café pour fêter la première journée, et surtout analyser la suite de la route. Nico sur son iPad. Stijn et Luc avec l’application Windy sur leur téléphone. J’utilise mon ordinateur et le logiciel belge Squid pour faire des routages.

Un été en Norvège – cela se mérite

Il y a 470 MN en route directe entre Wemeldinge et Stavanger. L’objectif de cette semaine – rallier Stavanger en Norvège en 7 jours. Il y a 4 jours de navigation mais la météo est compliquée. Plusieurs coups de vent (25-30 noeuds de face) sont prévus en Mer du Nord. Un premier qui dure jusqu’à mardi. Une seconde dépression qui arrive jeudi. Nico analyse une option folle via le canal de Kiel et l’Est du Danemark. Luc analyse un bord vers Hull au Royaume-Uni. Finalement, on choisit la route directe et une étape à Den Helder où nous attendrons « la bonne fenêtre pour traverser ».

Dimanche – deuxième jour

Réveil 6h30 pour profiter du courant favorable (1,5 noeuds). Nous sommes une petite dizaine de voiliers à sortir du port de Scheveningen. La légère brise de travers (7-10 noeuds) nous permet de naviguer à bonne allure. Nous passons devant Ijmuiden (port d’accès à Amsterdam). La mise à jour météo à 10h30 suggère une opportunité pour traverser le lendemain soir.

Avec Stijn, Nico et Luc à bord, j’ai la chance de naviguer avec des personnes qui connaissent bien le bateau et sont super faciles en mer. On n’a pas besoin de se parler pour se comprendre. Tout le monde sait qu’on porte le gilet en permanence, on s’attache de nuit, comment prendre un ris et comment dérouler le génois. Je peux dormir sereinement et j’en ai grand besoin.

En début d’après-midi, après avoir navigué entre des champs d’éoliennes en mer à bâbord et des dunes à tribord, on s’amarre à Den Helder. La ville est connue pour sa base militaire et son ferry vers l’île de Texel, mais pas spécialement pour son attractivité touristique. Le quartier des quais au centre ville nous surprend agréablement.

Lundi d’attente

On s’installe au café-restaurant de Stoom (super sympa) pour une journée de travail. J’enchaîne les capucinos , les calls et les e-mails. On affine ensemble l’analyse météo, les courants, et les routages. La fenêtre du soir s’améliore à chaque update météo (le modèle européen EMCW étant plus réaliste que l’américain GFS).

Départ à 16:30. La première demi-heure est pénible. Moteur à fond face à 25 noeuds de vent et des vagues d’un bon mètre. Ensuite on pique au Sud – à contresens de la route – pour éviter des hauts-fonds du Noorderhaaks. Le chenal étroit du Molengat n’étant plus praticable à cause de son ensablement. La mer est agitée et désordonnée. On ne fait pas les malins. On sort du chenal, virons et partons au nord. On lâche les 2 ris dans la GV (grand voile).

Qu’est-ce qu’on fout là ?

Nos estomacs s’accrochent mais les conditions sont horribles. Papa Charlie n’avance qu’à 4 noeuds (au lieu des 6-7 espérés). Le bateau tape dans les vagues et le vent mollit. Dur coup au moral. Le quinoa feta préparé par Nico peine à nous égayer.

Stratégie de route

La stratégie de route entre Den Helder & Stavanger comprend 3 phases. D’abord en ligne droite cap 355° au près bon plein vers la Norvège. Puis se décaler progressivement vers l’ouest après deux jours, cap 330°. Ensuite empannage et cap 20°-30° sur Stavanger.

L’enjeu est d’arriver avant jeudi midi et l’arrivée d’une dépression générant du vent de 20-25 noeuds (6-7 beaufort) de Nord le long de la côte norvégienne. Fait remarquable, la météo s’avérera extrêmement précise sur toute la traversée.

Fin juin les nuits sont courtes au Nord des Pays-Bas. Stijn et Nico prennent le quart de 20h à minuit. Luc et moi prenons le relais jusqu’à 4h pendant les heures de pénombres.

On alterne une heure à la barre et une heure en équipier de veille. Je prépare une petite soupe pour nous réchauffer. Ne croyez pas que nous sommes seuls en mer. Il y a d’abord deux rails de cargo à franchir et ensuite ce sont des centaines de plateformes gazières et pétrolières. L’AIS facilite la veille. Ce système – Automatic Identification System – permet aux bateaux de partager leur position, cap et vitesse via les ondes vhf. Sur l’écran de notre GPS, nous suivons les mouvements des bateaux autour de nous.

2h du matin

Luc: « Miguel, est-ce que toutes les plateformes sont éclairées?»
Miguel: « oui normalement »

Quelques secondes plus tard. On devine dans la nuit une structure non-éclairée sur notre bâbord. Elle n’est qu’à quelques dizaines de mètres. Silence. Cela n’est pas passé loin.

Mardi à la gîte

On a du mal à entrer dans le rythme. S’habiller est compliqué. Préparer à manger est compliqué. On souffre gentiment et on est tous fatigués. Stijn comate dans sa couchette. Luc s’accroche à la barre. J’ai des pensées sombres.

Pour le souper, je prépare des pâtes. Le moral remonte un peu. Ensuite je file dans ma couchette. Pas facile d’aller dormir à 20h.

Mercredi.

La mer se calme progressivement. On prend confiance. On prend plus de plaisir. Pendant notre quart du matin (8h-13h), Luc et moi reprenons des forces et mangeons abondamment. Luc fait du café. Je prépare une omelette. On déguste un saucisson et un bloc de fromage. Ensuite on finit les pâtes de la veille.

Quand Nico et Stijn émergent. Luc descend faire une sieste. Comme prévu, le vent mollit et tourne Sud. Le bateau gîte de moins en moins. On célèbre la belle journée avec un petit apéro. Premier moment de convivialité après 48h de navigation.

Je prépare un quinoa légumes pour le soir. On échappe aux pâtes sardines suggérées par Nicolas.

Arrivée sur Stavanger

Pour notre dernière nuit en mer. Nous alternons entre moteur et voile. Le vent tourne en quelques minutes de Sud à Nord. La dépression arrive et il reste une vingtaine de milles jusqu’à l’entrée de Stavanger. Au matin, la brume limite la visibilité à 500m. Je vois à l’AIS un cargo en route pour les Féroé. Il change son cap pour nous éviter et passe 1 MN (= 1.852 mètres) derrière nous. On ne le voit pas. On ne l’entend pas.

Luc s’éclate à la barre, au près de nouveau. Papa Charlie fonce à 8 noeuds. Le vent forcit déjà et je prends un ris dans la GV. A 4h, nous descendons dormir alors que la bouée ouest (9 éclats toutes les 15 secondes) signalant l´entrée du chenal est en vue. Deux virements de bord plus tard, l’autre quart allume le moteur et remonte face au vent dans le fjord de Stavanger. A 8h, nous enroulons la pointe en même temps qu’un paquebot de croisière géant. On hisse les voiles et finissons au portant cette belle navigation. On s’amarre au centre ville. Des hordes de touristes allemands débarqués du paquebot sillonnent la ville. Nous zonons fatigués mais avec le sentiment du devoir accompli. Je m’installe dans un café trop bruyant pour travailler et prendre quelques calls.

Zouq – Hekkan – Koko – Réparation

Stijn – en connaisseur de la Norvège – nous emmène au restaurant Zouq. Un excellent indo-pakistanais. A 21:30, je prends un dernier call alors que le reste de l’équipage roupille déjà. Après une bonne nuit de sommeil, on dédie la journée du vendredi au nettoyage et aux réparations. Luc s’attaque au feu avant tribord, puis à la planche du cockpit, la planche WC et enfin le plus dur / ré-accrocher les rideaux du carré. Tâche qui demandera ingéniosité extrême, entre achat de nouveaux boutons pression et démontage du plafond.

Samedi, on finit le nettoyage avant de repasser par nos adresses préférées. Burger cuit au charbon de bois chez Hekkan. Café bio bobo au koko café. Au retour sur le bateau – l’équipage suivant prend déjà ses marques. Mission accomplie.

Convoyage en hiver, de la Bretagne à la Belgique

Deux jours à tourner en rond au Crouesty suffisent. Ce hameau situé à la sortie du Golfe du Morbihan, à côté de Port Navalo, est devenu en 40 ans un lieu incontournable de la navigation de plaisance en Bretagne Sud avec plus de 1.400 emplacements à flot. On quitte le port en début de matinée après un bon petit déjeuner.

Le vent souffle du NW (nord-ouest) et le premier bord en direction du passage de la Teignouse est grisant. Grand Voile haute et génois déroulé, notre Oceanis 40 déboule à 8 nœuds au travers. A la sortie de la Baie de Quiberon, on lofe au près. Le vent grimpe à 20 nœuds et la mer est encore agitée du coup de vent de la veille. Nos estomacs sont à l’épreuve mais tiennent le coup. Je remonte le moral à coup de « Pain Saucisse ». Recette devenue incontournable à bord.

On tire des bords au près pour gagner au nord, en longeant la côte. On passe à côté du phare des Birvideaux avant de partir à l’ouest vers le sud de l’île de Groix. Des dauphins, presque comme d’habitude j’oserais dire, viennent jouer avec l’étrave de Carpe Maria III qui cherche un nouveau nom. Les mammifères ne nous lâcheront pas pendant de nombreuses heures.

La nuit tombe tôt (17h). Le vent s’écrase et on continue au moteur au Sud des Glénans vers la Baie d’Audierne. Je décide de longer la côte pour éviter du vent trop fort de face. Avec Julien et Stijn, on trouve un coffre dans la nuit noire au mouillage d’attente de Sainte Evette pour se reposer un petit peu.

Vent contre courant – tu éviteras

Deux heures à peine plus tard, mon réveil sonne et nous larguons les amarres avec Nicolas. On est optimistes. Grand voile haute et génois déroulé. Pendant qu’on avale les 10 milles nautiques qui nous séparent du Raz de Sein, le vent forcit. Dix. Quinze. Vingt. Vingt-cinq nœuds. Au près. Porté par le courant, Carpe Maria III s’approche à 10 noeuds de vitesse du phare de la Vieille et de la cardinale ouest de la Plate. On prend en catastrophe un, puis deux ris dans la grand voile. Heureusement la manoeuvre est fluide. La nuit est toujours noire même s’il y a des feux de bouées et de phares partout. La mer s’agite progressivement.

A l’entrée du Raz de Sein, la mer est en ébullition. Rien à voir avec les deux passages que j’y ai fait il y a quelques mois. La mer est une soupe. Les vagues vont dans tous les sens. Le vent contre le courant soutenu dans cet étroit goulot à la pointe de Bretagne ne pardonne pas. J’aurais dû mettre le réveil une heure plus tôt pour passer vraiment à l’étale. Trop tard. Nico est à la barre. Je regarde la carte sur mon iPad.

La mer déferle. Une vague. Puis une deuxième. Puis une troisième. Le pont se retrouve sous des milliers de litres d’eau . Ouf, les hublots sont étanches. Par chance, nous tirons le capot de la descente juste avant qu’une vague ne recouvre le roof entièrement. L’eau glacée dégouline mais n’entre pas dans le bateau. A l’intérieur, après deux vols planés, Thibaut qui dormait dans la cabine avant, se réfugie dans le carré.

Je crie aux trois équipiers à l’intérieur qu’on vire dans trois minutes. Encore dix minutes à tenir et la mer se calmera. Le bateau est emporté par le courant et tourne dans les marmites de courant. On vire puis on s’échappe de cet enfer vers la Baie de Douarnenez. Le jour se lève. Le vent tombe. Un dauphin prend de nos nouvelles. On continue la route au moteur vers la Presqu’ile de Crozon. Stijn me remplace sur le pont et je m’écroule dans ma couchette. Deux heures plus tard, l’équipage a déjà oublié la nuit difficile. Il fait presque beau lorsqu’on entre dans le magnifique port de Camaret-sur-Mer.

Le village est désert. On lunche dans le seul restaurant ouvert. Le café de la place. On s’offre des huîtres et un verre de blanc comme entrée. La suite, du poisson et un plat végétarien, est délicieuse. Le serveur/gérant est charmant. Julien, Nico et moi entamons une balade digestive le long des falaises. Le sentier sillone entre cratères d’obus et bunkers allemands jusqu’à la plage de Pen Hat. Quelques surfeurs affrontent le froid. De retour au port, je travaille pour le boulot avant d’analyser la suite de la navigation avec des logiciels météo et de routage.

Les amarres sont larguées juste avant le coucher du soleil. Je cuisine alors qu’on fait route vers le Chenal du Four. Le dernier passage à niveau qui sépare la Bretagne Sud de la Bretagne Nord. Le Chenal est heureusement beaucoup plus calme que le Raz de Sein franchi le matin même. A la sortie du chenal, le vent d’ouest se lève doucement.

Escortés par des dauphins, les deux quarts – Nicolas & Thibaut et Stijn & Julien – font de l’excellent boulot. Le pilote automatique fait le plus dur en barrant le voilier pendant la majeure partie de la nuit. La nuit est noire et il est difficile de barrer dans ces conditions. On fait plus de 7 nœuds de moyenne jusqu’à Dartmouth. Carpe Maria III atteint même 12 nœuds dans des surfs en arrivant sur les côtes anglaises. L’arrivée dans la petite ville de Dartmouth est source d’enchantement. C’est tellement beau. Vers 13h heure anglaise, on s’amarre à la Dart Marina.

Escale anglaise des pestiférés covid

Le capitaine du port nous refuse la place et nous renvoie sur un coffre au milieu de la rivière. Il faut que l’équipage suive la procédure covid en vigueur depuis la veille. Quarantaine. Test PCR le deuxième jour. Puis attente des résultats. A noter que le test PCR est fait soi-même grâce à un kit reçu par la poste et renvoyé par courrier. Bref, aucune valeur médicale. En plus cela coûte 100 Pounds. Et demain on est partis.

On lunche tranquillement à la place de port qu’on nous refuse. Branché à l’électricité, un petit chauffage nous réchauffe (et sèche) après la dure traversée. Le capitaine du port revient à la charge. Il veut qu’on dégage. On appelle un autre port situé 1 km plus loin qui accepte de nous accueillir. Houra. Dix minutes plus tard, alors qu’on fait route, on nous refuse l’accès à nouveau. On finit sur un ponton, sans eau ni électricité, au milieu de la rivière Dart. Le moral est en berne.

Je lis sur les sites gouvernementaux en détails les mesures covid en vigueur. La procédure telle qu’expliquée a du sens pour les voyageurs qui arrivent à Heathrow et qui rentrent chez eux (en quarantaine), mais n’a aucun sens pour des marins. La section « exceptions » offre notre planche de salut. En tant que marins professionnels, double vaccinés, nous sommes exemptés de toute contrainte covid. Yallah. Le deuxième port accepte de nous mettre sur un ponton – non relié à la terre – mais avec de l’électricité. Au moins on passera une bonne nuit.

On gonfle l’annexe et on passe deux heures à terre pour faire quelques courses, boire une pinte de Guinness locale et manger un fish and chips. A 21h, tout le monde roupille comme des biens heureux. Le ventilateur de notre chauffage électrique nous berce.

25 nœuds sinon rien

Après une nuit de sommeil, le port pas convaincu d’avoir bien respecté les règles nous offre la nuit, et évite ainsi de nous inscrire dans ses registres. Plus énorme. Les douanes, avec qui je suis en contact depuis la veille, m’appellent pour me prévenir qu’ils préparent une descente sur notre bateau. Ils nous conseillent de partir. Véridique !

A 14h, nous reprenons notre route vers la Belgique. La tempête qui nous avait forcé à nous réfugier est sensée mollir. Le vent souffle du Nord. Il est polaire. Pendant 34 heures, nous faisons cap plein Est.

J’ai mal préparé la route et sous-estimé le courant à hauteur de l’île de Wight. On a plus de 3 nœuds de courant de face… Heureusement, le vent vient de terre (et la mer est calme), et Carpe Maria avance à 8 nœuds sur l’eau. Chaque mise à jour météo nous promet un vent plus calme d’une quinzaine de nœuds. Au contraire. Le vent ne passe jamais en dessous des 25 et monte régulièrement au dessus des 30. L’équipage est lessivé par les embruns et le froid. Nous longeons d’abord la côte anglaise de jour, puis passons Wight de nuit, avant de traverser la Manche de jour. Enfin on arrive sur Calais puis Dunkerque de nouveau de nuit.

Hors quart, j’ai pu me préserver pendant la première nuit en restant au chaud relatif de la cabine. L’arrivée sur Calais est rock-n-roll. N’étant plus protégés par la côte anglaise, la mer se déchaîne et les rouleaux deviennent de plus en plus gros. Je prends la barre. A moitié pour m’occuper, à moitié en espérant calmer les embardées du bateau. Ma deuxième paire de gants reste sèche pendant cinq minutes avant de se faire avoir par un bel embrun. Après avoir traversé les rails de cargos du détroit, on croise le ballet des ferries assurant la liaison Calais-Douvres.

Dunkerque est enfin en vue. On manque de se faire peur en évaluant mal un cargo sortant du port industriel. A un mille du port de plaisance, le vent s’écroule enfin. On entre dans la nuit noire dans le port et on s’amarre en silence. Les rescapés lèvent la tête de leur sac de couchage. On se félicite tous. Heureux d’avoir fait tout ce chemin en équipe. J’avale un yaourt et m’enfonce dans mon duvet, bercé par le ventilateur du radiateur électrique.

Clap fin

Les quinze milles séparant Nieuwpoort de Dunkerque ne sont que plaisir. Le vent est de nouveau à 25 nœuds (6 bons beaufort). Cela caille toujours autant. Mais déjà nostalgiques, on appréhende déjà le fait d’arriver. La fin d’une belle histoire. Mission accomplie. On écoute Radio Beach, station locale animée par le papa de Stijn. Carpe Maria III fonce pleine balle vers son abri pour cet hiver. Les parents de Stijn nous accueillent à l’arrivée autour d’un café chaud.

Après le dîner au yacht club du VVW, Julien et Thibaut reprennent le train. Stijn rejoint sa famille. Nico et moi retrouvons l’humidité et la froideur du voilier. Au matin, sous la pluie, on sort le bateau de l’eau. La scène est cocasse. Le vent siffle dans les haubans et une pluie froide tombe du ciel. Trois voitures suivent – PAPA CHARLIE (le nouveau nom pour le bateau) – suspendu à la grue. Dans la première la famille de Nico. Dans la deuxième ma famille. Dans la troisième, mon oncle et ma tante de passage dans la région. Après l’hiver, Papa Charlie pourra enfin emmener des groupes voguer sur l’eau, dans des conditions bien plus confortables.

Priorités en mer: la grande confusion

Votre meilleur ami vous raconte qu’il vient de faire un accident de voiture. Après s’être rassuré de son état de santé, la première question qui vient à l’esprit est « qui était en tord ? Qui avait la priorité ? »

Les plaisanciers qui prennent leurs réflexes d’automobiliste en mer sont de plus en plus nombreux. Ils sont probablement mal aidés par leurs quelques connaissances des règles de régate. Comme l’explique le magazine Bateaux.com: en régate, un bateau bâbord amure doit se maintenir à l’écart d’un bateau tribord amure. Cette règle fondamentale est la plus connue : « Tribord amure, roi des mers ».

RIPAM: Règlement international pour prévenir les abordages en mer

Les néo-plaisanciers connaissant le RIPAM sont par contre moins nombreux. L’idée de cet article vient d’ailleurs d’une conversation animée avec un juriste de surcroit, propriétaire d’un voilier depuis 10 ans.

Le RIPAM règlement régit la manière dont les navires évitent les abordages (collisions). Il ne mentionne jamais le mot priorité, mais utilise le terme privilège. Le navire privilégié a le privilège de garder son cap et sa vitesse… mais en dernier recours devra tout mettre en oeuvre pour éviter une collision avec un autre navire. (Wikipedia)

Le RIPAM - Les règles de priorité - Culture Maritime
Source: https://www.culture-maritime.com/fr/page-se3_cours.xhtml

Les navires sont privilégiés dans l’ordre suivant (du plus au moins privilégié):

  • Navire travaillant en mer
  • Voilier tribord amures
  • Voilier bâbord amures
  • Bateau Moteur

Mêmes les militaires le disent…

Le 12 novembre 2021, le porte-avions Charles de Gaulle, navire amiral de l’armée française entrait en collision avec un voilier de 10 mètres battant pavillon polonais au large des îles d’Hyères. (source: Préfecture Maritime)

Dans un communiqué, la Préfecture Maritime de Méditerranée avait précisé qu’« Une enquête technique a été déclenchée à l’issue de cette collision. Il est donc prématuré de définir d’éventuelles responsabilités. Dans le domaine du droit maritime, il n’existe pas dans les textes de notions de -priorité- mais plutôt celle de -privilège-. C’est le terme exact et approprié. Et que ce soit entre deux voiliers, deux bateaux à moteur ou l’un et l’autre, la notion de privilège dépend de la capacité d’intervisibilité entre les navires ».

Semi-rigide du porte-avions portant assistance au voilier battant pavillon polonais. | PREMARMED

Conclusion

Tout navire doit mettre tout en œuvre pour éviter une collision avec un autre navire.

Le marin et écrivain Olivier de Kersauzon ne pouvait pas mieux résumer l’attitude à adopter: « Quand un cachalot de 45 tonnes vient de tribord, il est prioritaire. A bien y penser, quand il vient de bâbord aussi … »

Olivier de Kersauzon: « Quand un cachalot de 45 tonnes vient de tribord, il est prioritaire. A bien y penser, quand il vient de bâbord aussi…

Aberwrac’h – Quiberon [Bretagne 2021]

La troisième et dernière semaine de ce périple breton commence par un contrôle des douanes dans le port de l’Aberwrac’h. Alors que notre Dragon Océan est dans un désordre pas possible suite à notre arrivée nocturne la veille, six inspecteurs montent à bord et contrôlent nos papiers. Acte de franchisation. Cartes d’identité. Livre de bord. Liste d’équipage. Contrat de location. Numéro mmsi. Le bateau – immatriculé aux Caraïbes – attire leur attention car cela est un mécanisme populaire pour réduire ses impôts en France. Heureusement tout est en ordre, et la bonne humeur des douaniers n’était pas feinte.

Contrôle des douanes à bord

Le courant de marée n’étant pas favorable avant 14 heures, un petit déjeuner en terrasse et une douche réparatrice s’imposent.

Le vent sud-sud-ouest est toujours contraire. La navigation commence au moteur dans les chenaux des roches de Portsall. Le mer est hachée. Le vent de face monte à 20 nœuds. Jérôme guide le bateau grâce à son application Navionics. Jens barre pour éviter d’attraper le mal de mer. Le Phare du Four marque la fin de la navigation « au mètre près » et le début du réputé Chenal du Four. Contrairement à mes attentes, la mer y est plus calme. A la pointe de Saint-Matthieu (sud du Chenal du Four), on déroule le Génois et nous continuons à la voile jusqu’à Camaret-Sur-Mer. J’aurais aimé aller à Mortgat ou Douarnenez, deux ports bucoliques mais plus éloignés de la route.

Apéro sur les quais de Camaret

Tempête au port

Nous restons deux jours à Camaret car une grosse tempête (8-9 beaufort) est annoncée pour le lendemain. Pendant la matinée, on profite du « calme avant la tempête » pour refaire une balade sur les falaises de la presqu’île de Crozon. L’après-midi et la soirée se passent au café. J’ouvre mon ordinateur professionnel et traite une cinquantaine de mails. Les rafales dans le port atteignent les 30 nœuds. Le bateau est sérieusement secoué. La tempête m’empêche de dormir avant 4 h du matin. Je vérifie les prévisions météorologiques pendant mon insomnie et décide de postposer le départ – initialement prévu vers 7h – à 13h.

Tour Vauban à Camaret-sur-Mer

Après une nuit blanche et un dernier cappuccino en terrasse sur les quais de Camaret, nous prenons la direction du Raz de Sein. La première heure le vent nous permet de tenir un bon rythme face à la houle résiduelle de la tempête. Le moteur prend le relais lorsque le vent tombe et nous faisons escale à l’île de Sein. C’est une petite île isolée avec à peine 195 âmes, située quelques centaines de mètres du fameux Raz de Sein où la mer devient impossible lorsque vent et courant s’opposent. Le courant peut atteindre 10 nœuds. Bref, pas le moment de rigoler. Vu l’absence de port « en eaux vives », les visiteurs sont peu nombreux. Ce soir-là, nous ne sommes que deux bateaux visiteurs à nous échouer. L’instant est magique. Nous sommes au bout du monde.

Île de Sein

Îles du bout du monde: Sein, Glénan & Belle-Île

A terre, on se promène jusqu’au bout de l’île, au phare de Sein. Sur les quais du « centre-ville », nous retrouvons de nombreux îliens. Assis sur des bancs bricolés. Jouant à la pétanque. Ou comme nous, profitant d’une bière de « chez Bruno ». Nous sommes (quasiment) les seuls visiteurs et vivons un vrai moment d’intimité « îlienne ». Durant la tempête de la nuit dernière, les rafales de vent ont dépassé les 140 km/h (soit 75 nœuds). Pendant que certains préparent le dîner, on prend des images aériennes de ce petit paradis avec le drone de Jens.

Île de Sein

Réveil très matinal et brutal. La marée descend et le port à échouage de Sein ne nous laissera bientôt plus partir. Il n’est même pas 6h lorsqu’on allume notre « Volvo » pour partir en catimini. Le soleil n’a pas encore pointé le bout de son nez. La journée est particulièrement frustrante. On tire des bords « carrés » face au vent. On progresse à 4 nœuds à peine vers le Sud. Des dauphins joueurs viennent égayer notre matinée dans la baie d’Audierne. A 15h, Dragon Océan est enfin amarré à un coffre dans l’archipel des Glénan. Des centaines de voiliers (catamaran, laser, 5.70) de l’école de voile des Glénans s’agitent sur le plan d’eau. On débarque en annexe sur l’île de Saint-Nicolas pour une courte balade, interrompue par la pluie. Dans le seul café de l’île – le Boucané – nous assistons à la victoire de Wout Van Aert sur l’étape du Mont Ventoux au Tour de France.

Promenade avant la pluie sur Saint-Nicolas

Le réveil est plus doux que les autres jours. Pas de contraintes marée ou courant en Bretagne Sud… Le bonheur peut être simple parfois ! On prend notre temps pour se mettre en route et j’en profite pour donner un petit topo sur la navigation. Calculer la distance. Faire un point par trois relèvements. Utiliser des alignements. L’objectif du jour sera de ne pas utiliser le GPS. On largue notre coffre après avoir hissé la grand-voile. Comme à l’île de Batz plus tôt dans la semaine, on quittera notre mouillage sans utiliser le moteur. (bien qu’il sera en stand-by pour la manœuvre)

A peine partis de l’archipel, la beauté nous éclate aux visages. Alors que les bateaux IMOCA de Romain Attanasio (double finisseur du Vendée Globe) et Jean Le Cam (3e du dernier Vendée Globe, 5 participations) filent juste devant nous, des oiseaux et des dauphins s’agitent dans tous les sens. Les premiers plongent de haut et à plusieurs dans la mer, les deuxièmes sautent hors de l’eau. La scène dure une bonne dizaine de minutes. On devine le banc de sardines ou maquereaux qui tente d’échapper à leurs prédateurs.

Fortinet de Romain Attanasio qui croise un voilier de l’école des Glénans
Oiseaux qui plongent dans l’eau à la pêche

Les conditions idéales espérées pendant trois semaines se mettent enfin en place. Vent de 15 nœuds de Sud-ouest et grand soleil. On change nos plans et décidons d’allonger la foulée. On n’ira pas à Groix ou Lorient ce soir, mais lofons de 20 degrés direction Belle-Île. On file enfin à 7 nœuds en ligne droite vers le but.

Clap fin

J’ai promis à l’équipage un dernier émerveillement pour ce soir… et le port de Sauzon sur Belle-Île ne manque pas son effet. Les quais sont animés, les voiliers de passages nombreux, les terrasses bruyantes,… On en oublie de préparer notre manœuvre de prise de bouée (avant & arrière). L’avant-port qui reste en vives eaux étant plein de voilier, on s’enfonce dans le port à échouage (grâce à notre voilier dériveur intégral) en suivant le canot du maitre du port. On manque de se foirer totalement. L’Ovni 395 étant une vraie savonnette, je dérape sur l’eau avec le vent qui monte légèrement. Marche avant, marche arrière. Avant, Arrière. Gros coup de gaz. On resort de l’emplacement devant une dizaine de spectateurs sur les bateaux voisins. Heureusement pas d’égratinures. La deuxième sera la bonne.

Sauzon à Belle-Île

Epilogue

Tout termine comme cela a commencé. Au restaurant. A Sauzon. Au menu pour notre dernière soirée ensemble. Huîtres et Lotte au « Grain de Sel». Merci à tous !

Itinéraire de l’Aberwrac’h à Quiberon

Tréguier – Saint-Malo – Aberwrac’h [Bretagne 2021]

On entame cette deuxième semaine de navigation à Tréguier. Après un café sur la place du village , on part explorer le chantier naval du village. Des dizaines de bateaux sont sur leurs bers à attendre des meilleurs jours et retrouver l’eau. Je suis étonné de voir neuf Boréals entreposés. Ces bateaux en aluminium sont conçus pour explorer les pôles nord et sud. Avec les neuf Boréals vus dans le port de Tréguier, cela fait 18 boréals au total. C’est une belle réussite pour les deux Jean-François à l’origine du chantier. Mais un peu triste d’en voir autant attendre de faire de beaux voyages.

Boréals alignés chantier Tréguier
Port de Tréguier

Nous partons peu avant la marée basse en direction de l’archipel de Bréhat. Au lieu de contourner le phare des Héaux-de-Bréhat, nous empruntons des petits chenaux – La Gaine et la Moisie – qui servent de raccourci. J’empruntais ces mêmes chenaux il y a plus de 15 ans, sans gps. C’était une navigation risquée où il fallait tenir deux amers blancs avec marque noire (le chenal de la gaine) sur une même ligne (alignement), ou encore l´amer du Rosédo avec le clocher de La Chapelle Saint-Michel pour le chenal de la Moisie. La difficulté n’est plus la même avec un iPad qui sert de gps avec une belle cartographie.

A Bréhat, on prend un coffre (une bouée) dans la baie de la Corderie au Nord-Ouest de l’île. La majorité de l’équipage part se promener, à la découverte des jardins soignés et goûtant des fleurs de capucines. A notre retour, un festin nous attend. Gratin dauphinois, parmigiana et saucisses. Les saucisses et merguez auront été au menu pendant une semaine entière suite à une erreur d’appréciation au moment de l’avitaillement.

Jolie maison à Bréhat

Le lendemain, on finit mon quatuor favori de chenaux avec le Kerpont et la Trinité (+ Moisie et Gaine) jusqu’à Paimpol. Dans le port, on s’amarre sur les pontons des Glénans. Quelle nostalgie! C’est là que j’ai appris à naviguer il y a plus de 15 ans et que j’ai passé mes étés pendant 5 ans. Je suis vraiment ému. C’est idiot.

Pas le temps de traîner à bord. À 11h on s’installe sur la terrasse de « l’Époque » pour un premier café. Une journaliste du Télégramme nous prend en photo et 5 min plus tard nous sommes sur la page d’accueil du quotidien breton. La ville des Côtes d’Armor est en ébullition en ce dimanche matin, le Tour de France (cycliste) va y passer. Après des centaines de voitures publicitaires, un sandwich et quelques cafés à notre terrasse en première loge, les coureurs arrivent à fond. En quelques secondes ils défilent et tout le monde rentre à la maison.

Les belges à fond dans le Télégramme – Tour de France à Paimpol

Notre journée sportive n’est pas finie. Le soir, sur la terrasse de la Paillote, nous assistons au match de foot Belgique – Portugal (1-0).

Nous passons toute la journée en mer et à la voile entre Paimpol et Saint-Cast-le-Guildo. Un dauphin solitaire nous salue dans la baie de St Brieuc. Nouvelle soirée foot dans un restaurant France – Suisse (3-3 et élimination française aux pénaltys). La pluie ne nous rate pas en rentrant au port à pied.

Dragon océan

… déjà le dernier jour pour le premier équipage. En deux heures on couvre les 8 Milles nautiques jusqu’à Saint-Malo. On écluse pour accéder au bassin Vauban avec un Figaro 3 qui va participer à une course. Dragon Océan, notre voilier, est amarré au pied de la ville close.

Ovni 395 au pied de la ville close

L’après-midi on se balade sur les remparts puis jusqu’à l’île du Grand Bé, accessible à pied à marée basse et abritant la tombe de Chateaubriand. Le dîner est de toute grande classe. Le restaurant la Corderie offre une vue sur Dinard et sur le barrage de la Rance. Au menu: Spritz Breton, Huîtres, Lotte et dessert accompagné d’un Chardonnay. On finit la soirée à la Trinquette – yacht club repères des marins qui participent au Tour de Bretagne en Figaro 3. Ils s’élancent dans 2 jours et feront le même parcours que nous.

Sur la plage de Saint-Malo

Julien quitte de trop bonne heure le voilier et les filles – Maëlle, Fanny et Amandine – vers midi. Avec Stijn, on en profite pour faire une petite lessive au centre ville.

La journée continue avec des courses en chariot avec Jens et Aude qui viennent d’arriver. En moins de 30 minutes (!!), on trouve tout ce qu’il nous faut pour les 10 prochains jours. Au retour on longe une vingtaine de Figaro 3 qui participent à la course. Je reconnais quelques skippers connus (Tanguy Le Turquais, Alexis Loison, Nils Palmeri).

Figaro 3 à Saint-Malo pour le tour de Bretagne

On continue par une balade dans la cité Vauban et un apéro avec vue sur les chenaux de Saint Malo. Nos voisins de table sont victimes d’une attaque de goélands. Retour au bateau et dîner cabillaud à bord.

Coucher de soleil & apéro à Saint-Malo

Premier jour de navigation avec la nouvelle équipe. Stijn et moi n’avons pas beaucoup besoin de parler pour se comprendre et savoir ce qu’il faut faire.

Après le passage de l’écluse, on poireaute 30 min devant la station gasoil des Bas-Sablons car un couple de touristes prend tout son temps pour faire le plein de son pêche promenade. Les premières heures sont au moteur avant de profiter d’un bon 15 noeuds de vent. Dragon Océan file à 7 noeuds. La pluie s’invite.

On s’arrête à Bréhec pour récupérer Jérôme et Margot en annexe avant de finir la journée au moteur à Bréhat, au mouillage de la chambre. Notre voilier étant un dériveur intégral, on entre assez loin dans la crique avec notre petit tirant d’eau, tandis que de nombreux navires jettent l’ancre dans le Ferlas moins bien abrité.

Embarquement d’équipiers à Bréhec
La chambre à Brehat

Le matin, on fait tous une longue balade jusqu’à l’île nord. Au retour, nous croisons de nombreux touristes d’un jour fraîchement descendus de la vedette. On en profite pour acheter une nouvelle bonbonne de gaz.

Les dieux de la météo ne sont pas avec nous. C’est au moteur qu’on va jusqu’à Batz. On arrive relativement tard et filons au pub de l’île pour assister au match Italie Belgique (2-1). Les français ne manquent pas de nous chamailler.

En Bretagne Nord, il s’agit de toujours avancer avec le courant, qui est favorable pendant 6 heures avant d’être contraire les 6 heures d’après. En attendant la marée favorable, nous faisons un petit tour sur l’île de Batz. On part à la voile de notre mouillage dans le port de Batz (sans utiliser le moteur).

Notre ovni 395 – comme de nombreux dériveurs intégraux – a beaucoup de mal face au vent. On tire des bords carrés et le vent vient de où l’on doit aller. Les premières heures, nous ne progressons qu’à 2 noeuds vers notre but (au lieu de 5 ou 6…). L’arrivée à l’Aberwrac’h devient un chemin de croix. Le vent monte à 20-25 noeuds de face. Le courant s’inverse et devient défavorable. La mer se creuse. La nuit tombe. En plus, l’entrée de l’Aber (estuaire en breton) est périlleuse avec de nombreux cailloux. La moitié de l’équipage est HS pour cause de mal de mer.

Premier soulagement au moment de passer la bouée qui marque l’entrée du chenal. On peut enfin relâcher les écoutes et arrêter de faire du près. On démarre le moteur. Plus loin on affale les voiles et enfin on s’amarre à côté du canot orange et vert de la SNSM. Il est minuit. On n’a pas encore mangé mais on est heureux d’être arrivés.

Quiberon – Tréguier [Bretagne 2021]

Déjà une semaine que nous avons largué les amarres depuis Port Haliguen – Quiberon. La première journée, traditionnellement animée par les courses et le rangement dans le bateau, a continué de belle manière par le passage de la Teignouse et l’arrivée à Ster Wenn – crique idyllique au Nord de Belle-Île. Le meilleur devait encore venir. Après avoir grimpé en haut des falaises entourant notre crique, le papa de Maëlle nous emmenait jusqu’au ravissant port de Sauzon pour un dîner au Café de la Cale. Au menu : Spritz, Lotte et tarte aux pommes au cidre avec glace vanille.

Ster Wenn – Belle-Île
Sauzon – Belle-Île

Le deuxième jour, on remonte toute la Bretagne Sud jusqu’au Guilvinec, port de pêche avec un chenal d’accès balayé par la houle d’ouest. En route nous explosons malheureusement notre spinnaker qui sera bon pour la poubelle. Quelques instants plus tard, notre Dragon Océan croise plusieurs centaines (!!) de dauphins en chasse. On finit la journée sous la pluie battante dans un bar tabac pmu du Guilvinec.

Dauphins qui chassent

La troisième journée est un enchaînement de grands moments. D’abord, le passage du raz de sein, réputé pour son courant fort et sa mer agitée. Ensuite la baie sauvage de Douarnenez et enfin le goulet de Brest avant de s’arrêter à Camaret-Sur-Mer. Le trajet se fait au moteur qui bégaie. Des algues dans le gasoil perturbent l’alimentation. Maëlle, Amandine et Julien se baignent. En fin d’après-midi nous marchons sur les falaises de la presqu’île de Crozon. Les vestiges de bunkers allemands sont entourés de cratères, témoins des bombardements alliés. On finit la soirée dans un pub irlandais avec d’autres belges pour le match euro 2020 Belgique Finlande (2-0 Vermaelen et Lukaku).

Plage de Camaret-sur-Mer
Quai de Camaret

Pas de navigation en ce mardi. Nous marchons plus de 20 km sous le soleil autour de la Presqu’île de Crozon. Les falaises et les plages s’enchaînent. Nous suivons le GR34 et croisons beaucoup de marcheurs. Je passe une bonne partie de la journée au téléphone pour essayer de trouver un mécanicien pour notre moteur. Notre voisin de ponton à Camaret est tout sauf conciliant. Il nous traite tour à tour de menteur ou d’incompétent sans véritable raison si ce n’est qu’on est à côté de son bateau.

Plages presqu’île Crozon
Pré-Filtre à gasoil

Le mécano arrive à l’aube, et en une heure change le filtre et le pré-filtre à gasoil. Il ajoute un produit dans le réservoir pour dissoudre les algues. Problem solved ouf ! On part au près vers le chenal du four, étroit passage entre la terre ferme et les îles de Molène et Ouessant. Les courants y dépassent les 5 noeuds. On tire des bords au près jusqu’à la crique de Brignogan-plages. L’ovni 395 se pose gentiment sur la vase du port. Pour Fanny, nous allons au café du port voir France Portugal (2-2).

Ovni Dragon Océan à Brignogan-Plages
Photo prise à 23:30 sur Brignogan-plages avec la lune en fond

Réveil à 6h pour Stijn, Julien et moi. On souhaite passer la journée à l’île de Batz qui n’est qu’à 14 MN et le courant n’est favorable (2-3 kts) que jusqu’à 8h. Le lever du soleil sur la mer calme est grandiose. Le reste de l’équipage émerge alors que nous sommes amarrés à un coffre dans le port de Batz. Après une belle promenade sur cette île de fermiers, nous mangeons des moules au café du port. Pour retourner au bateau, on patauge dans la vase contre la marée montante à vitesse v-v prime. Stijn finit à la nage pour nous récupérer avec l’annexe.

Dragon Océan dans le port de Batz

Alors que la marée continue de monter, on navigue au milieu des cailloux de la baie de Morlaix jusqu’à Ploumanac’h sur la côte de granit rose, haut lieu touristique de la Bretagne Nord. Les visiteurs viennent admirer les roches rosées et arrondies sur les sentiers du bord de mer. Maëlle, Amandine et Julien finissent la journée par une petite nage tandis qu’on prend l’apéro au soleil sur un caillou rose.

Apéro à Ploumanac’h

Vendredi matin, deuxième demi-journée de pluie depuis le départ. Nous abrégeons notre balade pour nous réfugier un café allongé dans un bar tabac. Vers 16h, on se met en route pour Tréguier. Le vent est mollasson mais suffisant. Un épais brouillard nous empêche de voir à plus de 1 MN. La brume se dissipe en remontant la rivière du Jaudy. Véritable madeleine de Proust pour moi. C’est un trajet que j’ai probablement fait plus d’une vingtaine de fois alors que je naviguais au départ de Paimpol l’été. Le long des berges de la rivière, les champs de blé et les prairies tombent dans l’eau. L’instant est parfait pour commencer la soirée. Le village de Tréguier n’a pas changé en 20 ans. Au centre du patelin, la cathédrale Saint-Tugdual est toujours aussi impressionnante.

Notre ovni 395 à Tréguier au milieu des Boréals du chantier juste à côté
Remontée du Jaudy vers Tréguier
Cathédrale Saint-Tugdual à Tréguier

Virtual Regatta – options pour la remontée de l’Atlantique Sud

Après 6 semaines de courses, au point Nemo, les 20.000 premiers du Vendée Globe virtuel se tenaient dans une poignée d’heures. Entre Nemo et le Cap Horn, soit 5 jours, la flotte s’est éclatée et un petit groupe de 3.000 coureurs a pris la poudre d’escampette avec un matelas de 2-3 heures déjà.

Avouons-le, le tour de l’Antarctique fut long et même ennuyant par moment, avec des voiliers à la queue-leu-leu le long de la zone d’exclusion Antarctique (ZEA). Le plus frustrant pour les leaders fut que cela revenait sans cesse par derrière. C’est-à-dire que les poursuivants bénéficiaient de meilleurs conditions météos qu’eux

Atlantique Sud – L’anticyclône qui barre la route

Décidément, l’Atlantique Sud aura joué les troubles fêtes tant lors de sa descente que de sa remontée. La faute, un anticyclone de Saint-Hélène qui prend ses aises et s’étend sur toute la largeur de l’océan. Les marins virtuels n’auront d’autres choix que de le traverser.

La situation au 26 décembre ne va faire qu’empirer. L’anticyclone devenant littéralement gigantesque.

Routages pour 3 positions différentes (24/12 à 16h)

Pour analyser le casse-tête de l’Atlantique Sud, je vais analyser les options pour 3 voiliers.

  • Tipapachéri (25ème), passé par le détroit de Le Maire, il est en route pour couper par les Malouines
  • LuxairFrance (1.909ème) – compère de Tipapachéri au sein de la team MCES – c’est tout simplement le plus gros palmarès de la voile virtuelle. Il est décalé à l’Est.
  • Ian Lipinski – double vainqueur de la mini-transat (réelle!!) et vainqueur de la dernière Transat Jacques Vabre. Cet excellent marin pointe à la 27.000ème place de la course virtuelle et est en passe de franchir le Cap Horn

Pour effectuer les routages, j’ai mis un point au large de Recife (la pointe du Brésil). Nous utilisons le modèle GFS 90 km, la polaire Virtual Regatta à 96% et le logiciel météo Squid X.

La première chose qui saute aux yeux. Les 3 trajectoires se regroupent et se suivent. Même si la situation est compliquée, les routages – peu importe la position (Tipapachéri vs LuxairFrance), où le retard en temps (Ian Lipinski) semblent unanimes, il faut faire route vers le Nord-Est. A noter que Tipapachéri & LuxairFrance devraient se rejoindre.

Cela revien(drai)t encore par derrière

Ian Lipinski, qui accuse 300 MN (15-20h) de retard au moment du passage du Cap Horn, va bénéficier de meilleurs conditions et refaire son retard.

Mise à jour le 25/12 à 10h – un break à l’avant

Une légère bascule pendant la nuit de Noël a permis au groupe emmené par Tipapachéri de passer sans encombre au travers des Malouines. Les nouveau routages leur donnent une belle avance sur LuxAirFrance. Le retard de Ian serait également conséquent.

Conclusion

Les multiples zones de vent faible à contourner vont offrir un magnifique terrain de jeu – fini le train le long de la ZEA. Cependant, et c’est l’histoire de ce Vendée Globe. Est-ce que les retardataires vont encore bénéficier de meilleures conditions et pouvoir revenir sur les leaders?

MigTheSailor – 933ème à l’approche des Malouines

Virtual Regatta – Routage 16 novembre – Atlantique Sud

La louche brésilienne ou couper le fromage? Tel est le dilemme pour la flotte des e-sailors de ce 9ème Vendée Globe au moment où ils déboulent au reaching plein sud vers le pot-au-noir. La louche brésilienne demande d’investir des milles et de s’éloigner de la route directe, tandis que tenter la route plus directe (couper le fromage) est moins risquée au niveau des classements intermédiaires

Pour rappel, en 2008-2009, cette fameuse louche brésilienne avait permis au Professeur – Michel Desjoyeaux – de revenir sur la flotte avant d’ensuite arracher un deuxième sacre sur le Vendée.

Routage au 16 novembre à 8h45 UTC

J’ai effectué 3 routages en ce 16 novembre à 8h45 UTC. (9h45 heure française). En disposant des waypoint plus sud, plus est, et en ayant une vue à 10-12 jours. Le routage Sud et Est m’envoie via la fameuse louche brésilienne.

Sur le premier graph, on voit que la route en rouge (louche brésilienne) avance mieux et passe très proche de Recife. Elle demanderait de faire un cap au 190-200 dès maintenant, tandis que la route « directe » demande de faire un cap au 170°.

Atlantique Sud

Sur le prochain graph, on voit que la louche brésilienne est gagnante sur les 2 waypoints plus au sud (et est). Il s’agit cependant d’un routage à 12 jours, faible en fiabilité.

Investissement à haut risque

D’autant plus que à l’heure où j’effectue cette première analyse, l’investissement que représente la louche brésilienne est énorme. Ainsi, le 24 novembre à 12h UTC, les bateaux seront presque à la même latitude (quoique un peu d’avance pour la route brésilienne), mais avec un décalage de 800 MN en EST-OUEST. Qui osera investir un retard de 800 MN (soit 3 jours de nav!!!) dans l’espoir de toucher des meilleurs vents?

Conclusion: trop tôt pour conclure – je reste au centre

Alors que mon IMOCA est placé entre les OUEST (Toppen, Tipapachéri) et les EST (Luxairfrance, Loskipper), je vais rester bien sagement au centre, entre les 2 options et attendre encore 1-2 jours que la situation se décante dans l’Atlantique sud. Je fais cap au 176°, compas non verrouillé pour encore 24 heures.

Virtual Regatta – Météo et Routages au 10 novembre

Ce début de Vendée Globe 2020-201 est tout simplement inédit d’un point de vue météorologique. Alors que la baston est traditionnellement réservée pour le Golfe de Gascogne et les côtes portugaises ou du moins les Canaries signifient l’arrivée des jours meilleurs. Traduisez: long surf au portant, vent d’une vingtaine de nœuds, poisson volant et le thermomètre qui grimpe. Cette édition est inédite. Les concurrents (virtuels) affronteront au moins 2 bastons entre la point de l’Espagne (Cap Finisterre) et les Alizés au Sud des Canaries.

Pascal Bidégorry expliquait il y a quelques jours: « La situation météo est beaucoup plus complexe qu’il y a quatre ans où les concurrents avaient fait du reaching dans le golfe de Gascogne, mis une voile de portant au cap Finisterre, contourné l’anticyclone des Açores et c’était parti ! Ils étaient rentrés dans les Quarantièmes en n’ayant pas du tout de mauvais temps. »

Mercredi 11 novembre : passage de front, vent favorable, puis vent faible

La météo de ce mercredi 11 novembre se comprend le mieux en l’analysant en 3 phases.

  • Phase 1: vent fort défavorable. Il s’agit de faire route vers le front le plus vite possible pour prendre les vents portant (=favorable) le plus vite possible. Avantage au bateau le plus au Nord
  • Phase 2: vent favorable au portant. Une fois le front passé, les bateaux peuvent faire cap au sud (200 puis 220°) à des grandes vitesses (20 nœuds). Les bateaux qui n’ont pas encore pas encore franchi le front n’avancent qu’à 10 nœuds face au vent.
  • Phase 3: vent faible: Mercredi après midi, une vaste zone sans vent (ou vent faible) va venir perturber la marche des bateaux vers le sud.
Phase 1: Vent fort défavorable. Les 3 bateaux (nord (jaune), milieu (vert) et sud (rose) font route face au vent
Phase 2: Vent favorable après le passage du front. Les bateaux MigTheSailor1 et Tipapacheri ont franchi le front, et ont du vent favorable. Ils avancent à 20 nœuds dans la bonne direction
Phase 3: Les bateaux longent (ou atterrissent?) dans une zone sans vent

Jeudi 12 novembre : s’extraire de la molle à tout prix !

De très nombreux skippers risquent de s’arracher les cheveux durant la journée de jeudi. Le premier enjeu sera de sortir de la molle (zone sans vent). Gare à ceux qui restent englués trop longtemps.

Ensuite, il s’agira d’enrouler la dépression (tropicale?) au large des Açores pour descendre dans du vent favorable vers le sud.

Vendredi 13 novembre – tempête tropicale Têta

Autres sources:

https://www.ouest-france.fr/vendee-globe/vendee-globe-virtual-regatta-ne-pas-rater-les-prochaines-heures-7045480

https://voilesetvoiliers.ouest-france.fr/course-au-large/vendee-globe/vendee-globe-l-heure-des-choix-nouvelle-analyse-strategie-de-mino-vittet-c8f4787a-2105-11eb-9386-cdc1164295a9

Centre de surveillance des Cyclônes: https://www.nhc.noaa.gov/

Virtual Regatta – H-5 – Briefing météo départ Vendée Globe

Routage 8 novembre à 6h UTC – Virtual Regatta – Départ Vendée Globe

Le vent sera finalement moins soutenu que prévu, une petite bulle de molle se mettant même en travers de la route des marins virtuels (flèches bleues d’une dizaine de nœuds) durant les premières heures de course. Le résultat est un premier passage de front un peu plus tard que prévu, lundi 9 nov vers 11h15 UTC (12h15 heure française). Le deuxième front devrait se franchir en début de nuit du mardi 10 novembre.

Routage 8 n ov 6h UTC – départ à 12h15 UTC Source: SailGrib

Prévisions météos golf de Gascogne 8 novembre vers 21h UTC – Source: WIndFinder

La situation à partir de mercredi 11 nov s’annonce complexe. Les marins virtuels devront gérer une très grande zone de calme devant Gibraltar ainsi qu’une dépression sur les Açores.

Roadbook pour les 3 premiers jours de course – Source: Squid

Pour aller plus loin dans l’analyse, je conseille la lecture suivante:

Bon vent !